Abeilles
Vers une interdiction d’épandre les pesticides la journée
Un arrêté inter-ministériel proscrivant l’épandage avant le coucher de soleil de tous les insecticides et acaricides pendant la période de floraison doit être publié dans moins de quatre mois.
Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture, a assuré qu’un arrêté d’interdiction des épandages – pendant la période de floraison – des insecticides et des acaricides en journée devrait être publié dans trois à quatre mois, lors d’une conférence de presse à Paris, le 28 avril. Pour l’heure, l’arrêté du 28 novembre 2003 (1) interdit déjà l’épandage de ces pesticides pendant la période de floraison, mais n’interdit pas systématiquement l’épandage en journée. Et pour cause, des dérogations existent pour un certain nombre de produits qui se voient attribuer une « mention abeilles ». Avec ce dispositif, l’épandage était autorisé pendant la période de floraison, mais sous conditions : notamment, «en dehors de la présence d’abeilles”. Tout le débat tournait autour de cette dernière notion. Olivier Belval, président de l’Union nationale de l’apiculture française, assure que « d’une part, la mention abeilles est délivrée un peu à la légère. D’autre part, les apiculteurs constatent des écarts sur les épandages qui sont faits à n’importe quel moment de la journée».
La luminosité attire les abeilles
L’interdiction d’épandre en journée en modifiant l’arrêté du 28 novembre 2003 devrait ainsi faire suite à la publication, le 31 mars dernier, d’un avis de l’Anses. Des précisions sont apportées sur la présence ou non des abeilles. L’Anses observe que « près de 90 des abeilles ont été observées entre 10h30 et 15h30 » et que « les plus fortes densités d’abeilles sont observées quelques jours après le début de la floraison ». Le paramètre déterminant selon l’Anses est donc la luminosité.
« Il conviendrait que, quelle que soit la culture concernée, les traitements phytopharmaceutiques
bénéficiant d’une dérogation, ne puissent être appliqués qu’après l’heure de coucher de soleil et dans les trois heures suivantes », recommandent les experts de l’Anses. Ainsi, Stéphane Le Foll, s’appuyant sur cet avis, a affirmé “qu’ il va falloir modifier les pratiques d’épandages vers des épandages le soir ».
Olivier Belval a ajouté que l’interdiction devrait être étendue aux fongicides et aux herbicides.
« Ces produits chimiques ont aussi des impacts sur la mortalité des abeilles », soutient le président de l’Unaf. Si Stéphane Le Foll, sur avis de l’Anses, a satisfait la demande de l’Unaf sur l’interdiction d’épandre les insecticides et les acaricides en journée, la partie n’est pas gagnée s’agissant des fongicides et des herbicides.
(1) L’arrêté du 28 novembre 2003, paru au JO du 30 mars 2004, fixe les conditions d’utilisation des insecticides et acaricides en vue de protéger les abeilles et autres insectes pollinisateurs.
-La Charte de bonnes pratiques agriculture et apiculture signée
Un des objectifs est de résoudre le problème de santé des abeilles», a déclaré François Burgaud, directeur des relations extérieures du Gnis (interprofession des semences et plants), lors d’une conférence le 28 avril, en marge de la signature de la Charte de bonnes pratiques agricoles et apicoles en pollinisation. Les signataires sont l’Anamso (agriculteurs-multiplicateurs des semences oléagineuses), le Gnis, l’Itsap (institut de l’abeille), l’UFS (française des semenciers) et l’AdaFrance (réseau du développement apicole). Ils rappellent qu’il s’agit « du résultat d’un travail commun des apiculteurs, agriculteurs-multiplicateurs et semenciers, pour renforcer le dialogue et leur collaboration historique ». Stéphane le Foll, a cité un des engagements figurant dans la Charte. « Si exceptionnellement, la conduite de la culture nécessite une intervention du multiplicateur ayant une incidence potentielle sur la viabilité des abeilles, il informera l’apiculteur au minimum 48 heures à l’avance pour que ce dernier puisse protéger les colonies, d’un commun accord ». La Charte sera actualisée tous les ans au mois d’avril.
Fop : la féverole condamnée
La Fédération des producteurs d’oléagineux et de protéagineux (Fop) voit dans l’avis de l’Anses sur la protection des abeilles “quasiment l’arrêt de mort de la culture de la féverole en France”. En cause, «l’impossibilité de procéder aux traitements indispensables au moment nécessaire». Un problème pour la féverole, notamment dans la lutte contre la bruche. “Sacrifier ainsi une production qui est pourtant un véritable atout et offre un tel potentiel tant pour les abeilles que pour l’alimentation humaine ou animale est une hérésie complète et une faute grave à l’heure où l’on parle d’agroécologie, de rotation des cultures et de biodiversité», juge la Fop.