“C’est navrant vu la situation économique”
Jean-Léonce Dupont, Président du Conseil général du Calvados, a visité l'exploitation de Christian Duchemin, producteur de pommes de terre, à Tourville sur Odon. Cette ferme illustre la cohabitation parfois difficile entre ruraux et urbains. L’occasion d’évoquer les problématiques foncières avec le président du Conseil général du Calvados.
Que retenez-vous de votre visite chez Christian Duchemin ?
J’ai rencontré un homme et une famille très dynamiques. Monsieur Duchemin est exploitant agricole depuis 1984. Il a créé une belle entreprise autour du conditionnement, de la vente de pomme de terre et diversifié les activités pour aujourd’hui employer une cinquantaine de personnes.
Des communautés de communes investissent pour inciter les entreprises à s'implanter sur leur territoire. Paradoxalement, Christian Duchemin semble avoir des difficultés à rester chez lui. Quel est votre sentiment sur cette situation qui peut sembler ubuesque ?
Effectivement de nombreuses communautés de communes mettent en œuvre des actions pour faciliter l’implantation d’entreprises et la création d’emplois à travers l’aménagement de zones d’activités.
Christian Duchemin et ses fils m’ont expliqué les difficultés de voisinage et de maîtrise du foncier qu’ils rencontrent actuellement pour maintenir et développer l’entreprise. C’est effectivement navrant vu la situation économique de notre territoire.
Les solutions sont évidemment locales et s’il peut les favoriser, le Conseil Général interviendra dans le cadre de ses dispositifs en faveur de l’aménagement des zones d’activités et de l’immobilier d’entreprise.
L'exploitation agricole de Christian Duchemin se retrouve peu à peu grignotée par la ville. Selon vous l'agriculture a-t-elle vocation à perdurer en zone périurbaine ? Ou préférez-vous privilégier de petites exploitations maraîchères autour des agglomérations ?
Même si son existence est rendue difficile par les projets d’urbanisation l’agriculture périurbaine a toute sa place tout comme les petites exploitations. Au travers du plan agricole et rural, le Conseil Général a toujours favorisé une agriculture diversifiée.
Comment expliquez-vous les difficultés rencontrées localement par l'entreprise Duchemin ?
Les difficultés proviennent d’une absence de dialogue et d’une insuffisance de planification en amont.
À travers la présidence du Conseil général, pouvez-vous jouer un rôle sur les problématiques foncières ?
Dans ce domaine, le Département met en œuvre plusieurs actions. D’abord, l’aménagement foncier (compétence obligatoire des Départements) a permis pour de nombreux ouvrages routiers (A 84, déviation de Loucelles, contournement de Bayeux, barreau A13 RN13, déviation sud de Caen…) de compenser les perturbations occasionnées par ces projets. Ensuite, le Conseil général assure la prise en charge à 80 % des frais d’échanges amiables de terres agricoles. C’est un dispositif de remaniement parcellaire relativement peu coûteux dont les avantages sont multiples et qui devrait être utilisé plus souvent. Enfin le Conseil Général envisage de favoriser la réutilisation des bâtiments d’entreprise délaissés. En effet, un recensement dans le Calvados a permis de mettre en évidence une centaine de bâtiments inutilisés représentant globalement une surface de 600 000 m2. Nous souhaitons inciter les chefs d’entreprise à mener une réflexion quant aux possibilités offertes par la réutilisation d’un bâtiment existant avant de réaliser un bâtiment neuf consommateur de terres agricoles.
Par le passé, le Conseil général a souhaité acquérir des terres pour les classer en espaces naturels et sensibles. N'avez-vous pas accentué la pression foncière ?
Cette politique d’acquisition des espaces naturels ne porte que sur des sites naturels remarquables, le plus souvent délaissés par l’agriculture (zones humides, landes, bois…).
La FDSEA 14 et les Jeunes Agriculteurs ont lutté sur la problématique de la circulation des engins agricoles. Le réseau routier est l'une de vos compétences. Considérez-vous que le message des agriculteurs est bien passé auprès de vos services ?
Oui, ce message a été entendu et sur le réseau routier départemental, il en a été tenu compte, notamment des gabarits des nouveaux matériels agricoles.