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Conseil régional : des intentions au passage à l’acte

Le nouveau président de la Normandie a consacré sa première visite d’exploitation au Gaec du Clos Roset à St-Georges-de-Bohon dans la Manche. Visiblement, l’heure est à l’état de grâce. L’espoir est grand mais les professionnels agricoles attendent le maçon au pied du mur. Entretiens.

© TG

Arnold Puech d’Allissac (président de la FRSEA Normandie) : économie, emploi et formation, foncier

“Hervé Morin a tenu des propos rassurants. Les attentes de la FRSEA Normandie vis-à-vis de la Région portent sur 3 points. Tout d’abord, une attente économique et notamment la mise en place d’une marque Normandie. C’est un vrai challenge, une façon d’apporter de la valeur ajoutée à notre région et bien sûr aussi aux producteurs.
Le second point porte sur l’emploi et la formation. Les besoins à ce niveau sont énormes eu égard aux défis que l’agriculture régionale doit relever.
Le dernier point concerne le foncier : trop de terres agricoles sont encore gaspillées dans notre région.
Au-delà de ces 3 axes majeurs, nous attendons une rectification des critères d’attribution de la PCAE (Plan pour l’Accompagnement et l’Adaptation des Exploitations agricoles). Le dispositif doit être simplifié et une attention particulière doit être portée à l’attention des jeunes agriculteurs.
La nouvelle équipe en place doit répondre aux attentes déjà exprimées par les agriculteurs lors de nos différentes rencontres durant la campagne plutôt qu’à la volonté de certains écolos et autres courants de pensées.
L’agriculture est grande une chance pour la Normandie et la marque Normandie une chance extraordinaire pour l’agriculture. Les Bretons ont réussi à vendre leur marque chez eux, mais aussi partout en France. A nous de faire autant, voire mieux, pour se redonner un peu de perspectives et d’espoirs”.

 

Pascal Férey (président de la FRSEA Basse-Normandie) : concrétiser les promesses très vite

“Les propos tenus me vont bien. J’ai entendu beaucoup de pragmatisme et une véritable volonté d’avancer et d’avancer vite parce que le calendrier est ressérré. Hervé Morin s’est déclaré prêt à monter à Bruxelles.
Il veut renégocier les modalités
d’attributions des fonds européens. C’est une bonne chose, la mouture précédente ayant plus reposé sur le dogme que sur le souci d’efficacité.
Concrètement, dans les premières mesures phares, nous attendons une simplification des procédures administratives dans les programmes de financement de la modernisation. Idem sur les mesures agroenvironnementales et territoriales. Nous attendons plus de consultation en amont au travers du comité de pilotage. Nous attendons de cette nouvelle gouvernance une politique rénovée. Je pense que nous sommes les mieux placés pour exprimer nos besoins. Que le Conseil régional nous consulte d’abord et qu’il décide sa politique ensuite.
Il faut redonner de l’espoir au monde rural et l’agriculture constitue une grande chance pour notre région. La Normandie, c’est un gisement de productions mais aussi de consommateurs. La Normandie, c’est aussi aux portes de Paris. Notre territoire doit sentir qu’un souffle nouveau est arrivé. Voilà ce que j’espère pour les 6 ans à venir. J’y crois mais c’est au pied du mur qu’on reconnait le maçon alors j’attends que les promesses annoncées durant la campagne et aujourd’hui se concrétisent”.

 

Sébastien Amand (président de la FDSEA de la Manche): accompagner les OP (Organisation de producteurs)

Que le président Morin consacre sa première visite en Manche constitue une forme de reconnaissance, mais il y a beaucoup d’inquiétudes dans notre département par rapport à cette nouvelle région à 5 départements et une capitale administrative en Haute-Normandie où la population est bien plus dense. Le Mont-Saint-Michel, c’est loin de Rouen, mais nous espérons être entendus quand même. Etre entendus particulièrement sur les problématiques de l’élevage d’autant plus que la Manche est leader national dans ce domaine. Les conditions économiques dans lesquelles nous avons terminé 2015 et dans lesquelles nous démarrons 2016 génèrent de très grandes attentes par rapport aux politiques d’accompagnements que mettra en place le Conseil régional.
Au-delà des mesures d’urgence, j’ai entendu ce matin Hervé Morin soutenir les OP (Organisation de Producteurs). Certaines sont en place et désormais reconnues, mais le chemin à parcourir est encore long. A titre d’exemple, seuls 20 % des producteurs de lait de notre région livrant à Lactalis sont adhérents d’une OP. Pas facile dans ces conditions de s’asseoir à une table des négociations pour peser dans les débats. C’est un constat d’échec. Le Conseil régional doit donc donner une impulsion supplémentaire pour conforter l’existant et développer ce qui doit encore l’être. C’est un chantier qui doit être ouvert dans les plus brefs délais”.

 

Jean-Pierre Delaporte (président de la Chambre d’Agriculture de l’Eure) : de la simplification et de l’harmonisation

Dans l’Eure, on connaît bien le président Morin. On croyait en son élection. On est donc complètement satisfait. On va travailler ensemble, mais il est obligé d’être bon parce qu’il a été élu pour cela. L’agriculture de notre département, comme celle de Seine-Maritime, attend désormais d’être mieux traitée par le Conseil régional. D’être traitée comme l’a été celle de la Basse-Normandie lors de la précédente mandature. Il ne faut pas croire que les zones intermédiaires, plus particulièrement dans nos vallées plus ou moins séchantes, vont bien, même en grandes cultures. La Région doit donc aller chercher de l’argent européen pour compenser les carences de l’Etat. Cela demande, j’en conviens, un peu de temps.
A court terme, j’attends une simplification et une harmonisation, entre les cinq départements, des dispositifs d’accompagnement envers l’agriculture. L’élevage a besoin d’un signe fort. En venant ici dans la Manche ce matin, j’ai vu du blé sous la flotte. C’est un non-sens agricole. Mais, quand on bouffe du pognon avec des animaux tous les matins en se levant, on en a marre et on est prêt à tout tenter pour ne plus en perdre.
Au-delà, et de façon plus générale, j’ai entendu le président Morin parler d’accompagnement de la production et donc de l’économie. Il a évoqué par exemple un plan silo pour le stockage des céréales. Cela va dans le bon sens. Les attentes peuvent différer d’un département à l’autre”.

 

Patrice Lepainteur (président de la FDSEA du Calvados) : soutenir aussi l’agriculture conventionnelle

J’attends que les promesses qui ont été faites soient tenues. Concernant les fonds européens, j’ai entendu le président Morin dire que ce qui avait été fléché par l’ancienne équipe allait faire l’objet d’un certain niveau de révision. C’est une bonne chose que de vouloir aider toutes les agricultures et pas uniquement l’agriculture que certains ont voulu mettre sur un piédestal : une agriculture de proximité, une agriculture en prise directe avec le consommateur, une agriculture liée à des produits d’appellations spécifiques... Bien sûr qu’il faut les aider, mais il faut penser aussi à l’agriculture conventionnelle, penser à ces milliers de paysans normands qui travaillent d’arrache-pied au quotidien pour essayer de se tirer un revenu et qui ne sont pas dans des marchés de niche. Eux aussi ont besoin de soutiens et j’ai cru comprendre que le nouveau président souhaitait corriger le premier ciblage européen.
Autre sujet qui a retenu toute mon attention, la volonté exprimée d’accompagner les OP (Organisation de Producteurs). C’est une bonne nouvelle. On voit bien les difficultés qu’ont par exemple les producteurs de lait à s’organiser entre eux. Ce n’est pas une habitude, ils le découvrent. Il faut donc un coup de pouce financier et politique pour accompagner leur structuration, leur animation... C’est une nécessité pour pouvoir discuter à armes un peu moins inégales avec les grandes entreprises de transformation”.

 

Anne-Marie Denis (président de la FDSEA de l’Orne) : sortir l’Orne du trou du cul du monde

“Un tiers des agriculteurs sont des agricultrices et c’est une bonne chose qu’elles soient bien représentées dans les différentes commissions du Conseil régional et plus particulièrement celle de l’agriculture présidée par Clotilde Eudier, agricultrice à Saint-Romain-de-Colbosc en Seine-Maritme, avec qui j’ai pu échanger ce matin.
Au-delà, pour être efficace, il faut travailler en équipe et travailler avec des personnes issues d’autres milieux socioprofessionnels est toujours très enrichissants.
J’attends de la nouvelle équipe qu’elle lève nos doutes. Qu’elle nous explique sa vision de l’agriculture régionale, basée principalement sur l’élevage,secteur en très grandes difficultés, et avec quels moyens techniques et financiers elle compte l’accompagner.
Au-delà du conjoncturel, c’est plus de dynamisme que nous appelons de nos vœux. J’ai entendu parler ce matin de “plus d’innovations, plus de motivations, plus d’ambitions...” Tout cela me va bien, reste à passer des bonnes intentions aux actes.
Pour finir sur une note d’humour, je reviendrai sur les propos de campagne du candidat Morin évoquant notre département au “trou du cul du monde”. Je ne l’entends pas de cette oreille. Ces propos ont suscité beaucoup de réactions au sein de notre réseau. Mais, s’il le considère ainsi, je lui lance un défi : qu’il nous en sorte et qu’il fasse de l’Orne un département dynamique”.

 

Daniel Génissel (président de la Chambre régionale d’agriculture) : être simple et efficace sur la modernisation

“J’ai entendu ce matin un président de Région volontaire et qui considère que l’agriculture est une vraie chance pour la Normandie. Un président qui reconnaît que ce potentiel agricole est important et qui estime qu’il faut à la fois une agriculture compétitive pour les marchés généraux et une agriculture qui utilise toutes ses ressources et toutes ses diversités pour utiliser l’ensemble des niches. Ça va de l’agriculture biologique à l’agriculture conventionnelle. Chacune y a sa place. Concrètement, nous avons proposé qu’en matière de modernisation, on soit à la fois simple et efficace, donc avec un vrai effet levier. Il ne faut pas tout mélanger. Ce qui avait peut-être été une tendance précédemment  avec 36 objectifs mais sans plus de moyens pour autant. Conséquences, les agriculteurs se perdaient. Il faut donc rester simple et compréhensible pour être efficace.
Concernant les fonds européens, la région est désormais autorité de gestion. Ses moyens ont été décuplés, mais il y a une maquette qui a été négociée par les équipes sortantes. Ce n’est pas facile d’en sortir. En matière européenne, les engagements pris doivent être tenus. Malgré tout, à mi-parcours, on peut s’attendre à des évolutions. Il faut regarder programme par programme ce qu’il y a nécessité de conserver, ce qui doit être conforté, ce qui peut être modifié. Tout cela doit se faire en concertation avec les instances représentatives”.

 

Sébastien Windsor (président de la Chambre d’agriculture de Seine-Maritime): de la Gourmandie à la Normandie

“Nous nous posions déjà la question depuis quelque temps de faire évoluer la marque Gourmandie (1) vers le mot Normandie  pour qu’elle soit plus visible à l’export. Quand nous l’avons créée, elle était destinée à notre région et ce jeu de mots Gourmandie était compréhensible par les Normands. Ce développement régional étant acquis, on veut désormais se développer non seulement au reste de la France, mais aussi à l’export. Il faut donc faire évoluer la sémantique pour intégrer le vocable Normandie. Nous étions prêts à le faire, mais nous attendions l’élection du nouveau président de la nouvelle région pour passer à l’acte de manière conjointe et cohérente. Nous allons fusionner très vite nos noms, fusionner nos logos. Cela nous permettra de lancer une marque commune portée par la nouvelle région Normandie et ses entreprises agroalimentaires de façon intelligente. Cela n’aurait pas eu de sens que de maintenir deux marques pour une même entité géographique.
Je pense que c’est une vraie chance pour nos entreprises, une opportunité à saisir, un facteur de développement, un signe fort et un marqueur de notre identité...”
(1) : Sébastien Windsor est aussi président d’Irqua Normandie, Institut Régional de la Qualité Agroalimentaire de Normandie, créé le 8 octobre 1999 sous l’impulsion de Daniel Epron, alors président de la Chambre d’Agriculture de Normandie.

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