Des prix rémunérateurs pour les éleveurs de viande bovine
Olivier Philippe président de la section viande de la FDSEA de la Manche dresse un constat sans appel sur l'état de la filière et réclame un redressement des prix à la production.
Olivier Philippe président de la section viande de la FDSEA de la Manche dresse un constat sans appel sur l'état de la filière et réclame un redressement des prix à la production.

>> Quel regard portez-vous sur la situation actuelle ?
Le mot confinement est incompatible avec nos activités d'élevage, mais il pourrait avoir de graves conséquences sur ces dites activités. Face au 19, le confinement est sans aucun doute la meilleure arme. Il bouleverse cependant nos vies, nos habitudes, notre façon de consommer. Plus de cantine, plus de restaurants et une restauration hors domicile qui souffre énormément. Les ventes en « drive » explosent au détriment des achats à l'étal dans les grandes et moyennes surfaces (GMS). Les consommateurs s'orientent vers le libre-service dans les rayons et le steak haché. Les boucheries traditionnelles font face malgré tout dans ce contexte inédit. Les ventes à la ferme sont aussi plébiscitées.
>> Comment la filière bovine s'est adaptée à la crise ?
Les premiers temps ont été conduits à l'aveugle avec un marché qui a eu besoin de digérer ses changements. Les veaux de boucherie ont vu leurs ventes s'effondrer voir même stopper net. La mévente et le stock de veaux laitiers en ferme en est une preuve par exemple. Mais la donne change. La fermeture des frontières bloque aussi les importations. L'Irlande et la Pologne par exemple sont obligées de stocker sur pied leurs animaux. Le tout couplé à une consommation qui se maintient en viande rouge et la mise en avant dans les GMS de la production française se traduisent par une relance des abattages d'animaux français.
>> Le prix payé aux éleveurs est déconnecté du marché ?
Si les voyants sont pratiquement tous au vert, les cours dévissent chaque semaine. C'est tout le paradoxe de la filière bovine et de ses atermoiements. Comme si elle devait vivre en crise permanente. Mais le fait est bien visible : le problème de la filière est bien structurel et non conjoncturel. En aucun cas actuellement nous sommes sur un épurement de marché sur la viande rouge finie. Le prix se doit donc d'être rémunérateur à l'éleveur, lui qui fait partie des forces vives du pays, lui pour qui le mot confinement est banni de son vocabulaire. A la fin de l'histoire, on n'exigera pas de médaille, mais notre récompense est que notre production soit rémunérée à son juste prix.
>> Quel message adressez-vous à la filière viande bovine ?
Nous devons dès maintenant envisager les scénarios de l'après covid-19. L'élevage doit répondre présent.
Ainsi, la filière bovine ne peut plus être un assemblage de corporations (éleveurs, négociants, abatteurs, GMS, etc...) qui cohabitent sans échanges structurants. Sinon, le covid-19 fera une victime de plus : la filière bovine purement et simplement. Que ceux qui veulent bâtir se montrent, et pour les autres, ceux du bon coup ou des profiteurs de crise, je n'aurais qu'un seul mot : QU'ILS RESTENT CHEZ EUX !