Avec l'ADASEA
Diagnostic énergétique : établir la corrélation entre l’environnemental et l’économique
Jeune agriculteur à Occagnes (61) et administrateur de l’ADASEA de l’Orne, Sébastien Allais a passé son exploitation à la moulinette du diagnostic énergétique. “Pour savoir si l’on n’est pas trop pénalisant”, lâche-t-il entre autres arguments.

La question énergétique : un des enjeux sociétaux de demain. Un enjeu et une véritable prise de conscience pour Sébastien Allais, jeune agriculteur installé en 2007, en GAEC avec son père, sur une ferme de polyculture/élevage à Occagnes (61) entre Falaise et Argentan. Casquette JA vissée sur la tête doublée d’une autre de membre du bureau de l’ADASEA de l’Orne, pas étonnant dans ces conditions qu’il soit grimpé dans le premier train bas-normand du diagnostic énergétique.
1/2 journée de travail
Ce diagnostic, ce n’est pas une énième couche à entasser sur le mille-feuilles administratif. “1/2 journée de travail soit 3 à 4 heures selon la complexité du système”, confirme Phillippe Touchais (ADASEA 61). Le premier boulot consiste à collecter un maximum de données. Une check-liste en quelque sorte de toutes les entrées et sorties d’énergie traduites en EQF (Equivalent Quantité litre Fioul). Le grand livre d’exploitation et les documents PAC sont largement sollicités.
Seconde étape : compiler toutes ces données pour calculer le coefficient d’efficacité énergétique. Inférieur à 1, l’exploitation consomme plus d’énergie qu’elle n’en produit. Supérieur à 1, c’est le contraire. Mais attention à l’interprétation de chiffres issus d’une approche encore en phase de développement et de règlages. “Cela donne une référence pour se situer et non pas se comparer”, pondère Philippe Touchais.
Le bilan du bilan
Conscient des limites actuelles du diagnostic énergétique surtout à cause d’un manque de références locales, Sébastien Allais dresse cependant un premier bilan positif du bilan. Avec une efficacité énergétique supérieure à 4, il se trouve conforté dans son système de polyculture /élevage : “toujours garder de l’animal et du végétal”, plaide-t-il. Au delà de ce premier constat, il a identifié quelques pistes d’amélioration. “On a vu où notre système pèche, c’est sur l’achat d’aliments. On pourra peut-être évoluer à ce niveau”. Autre point faible, un parcellaire éclaté gourmand en déplacements et donc en énergie. Une problèmatique foncière déjà plus compliquée à résoudre. Cependant, à l’échelon d’un territoire et si les diagnostics énergétiques venaient à se multiplier en soulignant un facteur limitant commun, cela viendrait conforter une démarche collective du dossier. Philippe Touchais et Sébastien Allais sont d’ailleurs sur la même longueur d’onde : “la question énergétique doit s’intégrer dans une réflexion globale”. Globale en y associant un maximum d’agriculteurs mais globale aussi pour ne pas la déconnecter du technique et bien sûr de l’économique.
Le train est parti. Fin 2009, les ADASEA bas-normandes auront réalisé 300 diagnostics, tous systèmes confondus, enrichissant ainsi une base de données qui ne demande qu’à monter en puissance. Il faudra aussi pousser la réflexion sur des terrains un peu plus minés. A titre d’exemple, énergétiquement parlant, il vaut mieux remplacer un déchaumage par une application phytosanitaire. Faut-il alors ramer à contre-courant ? A Christian, père de Sébastien, le mot de la fin : “on arrive à une agriculture raisonnée,” perçoit-il
En 2009, 250 bilans PLANETE seront réalisés en Basse-Normandie par les ADASEA avec l’aide du Conseil Régional et de l’ADEME
Dans le cadre du Plan Climat Régional “Défi’NeRGIE Basse-Normandie”, les ADASEA ont été retenues pour réaliser 290 diagnostics énergétiques des exploitations agricoles. Le diagnostic, basé sur la méthode PLANETE- Solagro, est financé conjointement par le Conseil Régional Bas-Normand et l’ADEME à hauteur de 80 %. Les ADASEA prennent en charge les 20 % restants afin de proposer un diagnostic gratuit aux agriculteurs volontaires, en particulier aux jeunes pour qui les questions énergétiques constituent aujourd’hui les enjeux de demain.
Un peu d’histoire…
Même si le bilan PLANETE peut paraître nouveau pour certains, voilà bientôt 10 ans que cette méthode a été développée par un cortège de professionnels et de chercheurs (CEIPAL, CEDAPAS, CETA de Thiérache, ENESAD, SOLAGRO) avec le soutien de l’ADEME. Cette méthode pour l’analyse énergétique de l’exploitation agricole a été améliorée au cours de différentes versions et est aujourd’hui pilotée par SOLAGRO, qui centralise également les résultats afin d’accroître une base de données de plus de 1000 références aujourd’hui. De nombreux acteurs et territoires utilisent déjà ce bilan à l’échelle nationale et démontrent par cet engouement la pertinence de ce diagnostic pour évaluer les performances énergétiques des exploitations agricoles.
Comment ça marche ?
Le principe du bilan PLANETE est simple : quantifier à l’échelle de l’exploitation les entrées et sorties d’énergie, et évaluer les émissions de Gaz à Effet de Serre. Pour y parvenir, le bilan convertit en énergie, mesurée en EQF (Equivalent Quantité Fioul brut), l’ensemble des achats (engrais, aliments, semences…) et amortissement des immobilisations (bâtiments et matériels) à partir d’Analyses de Cycles de Vie (énergie primaire, transformation, conditionnement et transport). Pour les sorties, la méthode donne une valeur énergétique aux productions, en fonction de leur capacité calorifique ou réserve d’énergie.
L’interprétation
Les résultats du bilan sont présentés de manière détaillée avec de multiples indicateurs et des références issues de la base de données PLANETE pour se situer par rapport à des systèmes similaires. Pour ne pas mettre au même niveau des productions n’ayant pas le même rendement énergétique, principalement l’élevage et les cultures, le bilan PLANETE propose une analyse partagée des résultats selon le type de productions, animales ou végétales, au sein de l’exploitation. Comme pour de nombreux diagnostics, le bilan PLANETE réclame une attention particulière sur l’explication qualitative des résultats pour ne pas faire d’amalgames en simplifiant une réalité complexe. De manière plus générale, le diagnostic énergétique ne constitue un outil intéressant pour l’agriculteur que s’il est intégré dans une réflexion globale avec les autres enjeux économiques, sociaux et environnementaux pour de vrais “bénéfices durables” au sein de la ferme.
Pour une prestation de qualité
La collaboration régionale des ADASEA de la Manche, de l’Orne et du Calvados a été initiée en 2008 suite aux retours positifs d’une première action pilote de l’ADASEA de l’Orne avec le Pays d’Ouche. Le travail en commun a permis aux conseillers d’optimiser la collecte et l’analyse des résultats pour plus d’efficacité et de réactivité. Ainsi, le diagnostic se fait aujourd’hui en saisie informatique et l’agriculteur peut visualiser, au bout de 3 heures d’enquête, ses résultats directement sur l’ordinateur. Il reçoit par la suite un document de 4 pages avec l’ensemble de ses résultats, affinés et commentés, accompagnés de deux fiches de synthèse reprenant les concepts, unités et coefficients du bilan.
Pour en savoir plus
• Si vous êtes intéressés pour réaliser un diagnostic énergétique PLANETE, n’hésitez pas à contacter les conseillers ADASEA aux coordonnées suivantes :
- Aude AMAR, ADASEA 14, au 02 31 70 88 08.
- Christian BODY, ADASEA 50, au 02 33 95 46 07.
- Philippe TOUCHAIS, ADASEA 61, au 02 33 31 4906.