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Du STO au remembrement : itinéraire d'un agriculteur centenaire

Raymond Gasnier est retraité agricole depuis 1982. Il a fêté, le 23 octobre, ses 100 ans. A son retour de la guerre en 1945, il a voué sa vie à l'agriculture et à sa modernisation. Rencontre.

© ED

lll Quand on lui demande le secret de sa longévité, Raymond Gasnier répond amusé : « je vais vous décevoir, mais je n'en ai pas ». Cet ancien agriculteur est né le 23 octobre 1919 à Saint-Aubert-sur-Orne. S'il est fils d'agriculteurs, Raymond Gasnier a pourtant démarré sa carrière professionnelle en tant que maçon « jusqu'à ce que je sois appelé en juin 1940. Les gendarmes sont venus me chercher dans le champ de mes parents alors que j'étais en train de faner, se remémore-t-il. J'ai été fait prisonnier pendant la guerre. On nous a envoyés en Autriche, près de la frontière hongroise. On est arrivé les pieds dans la neige. Vu que tous les hommes étaient partis au front, on a été réquisitionné pour faire tourner les exploitations. C'est comme ça que je suis devenu agriculteur », raconte-t-il. Le centenaire ne sera libéré qu'en 1945, date à laquelle il rebroussera chemin vers l'Orne. « Le train s'est arrêté à Paris, car les voies vers la Normandie avaient été bombardées, elles étaient complètement détruites. Je suis monté dans la charrette d'un homme qui allait à Briouze à cheval et j'ai fait les dix derniers kilomètres qui me séparaient de mon domicile à pied. Je n'avais pas prévenu mes parents. Les retrouvailles étaient très émouvantes. Ils m'ont donné à manger et m'ont habillé, car je portais les mêmes vêtements depuis cinq ans. »

Modernisation de la ferme
Un an après son retour en Normandie, Raymond Gasnier rencontre Lucienne, qui deviendra sa femme et la mère de ses cinq enfants. Cette dernière possède une exploitation avec sa mère à Echalou. Raymond Gasnier s'y installe en 1946. « Il y avait cinq ou six vaches et une petite dizaine d'hectares. On travaillait encore la terre avec les chevaux. » Au fil des années, l'exploitation s'est agrandie. « Après la guerre, il fallait tout reconstruire et nourrir le peuple. En 1952, l'État a attribué des aides aux agriculteurs pour moderniser les fermes afin de produire davantage », raconte Raymond Gasnier. L'exploitant édifie alors sa première étable, achète son premier tracteur en 1957, construit sa première salle de traite en 2X1 en 1959 avant de passer en 2X3 en 1968 et crée une stabulation libre d'une trentaine de places en 1969. Lorsqu'il cède la ferme à son fils, Claude, en 1986, celle-ci compte alors 40 vaches laitières et 36 ha.

Première Cuma du canton
Les enfants de Raymond Gasnier le voient comme un précurseur. « Il investissait pour moderniser l'exploitation. C'est lui qui a semé le premier hectare de maïs du secteur en 1961. Les exploitants voisins étaient très sceptiques parce que ça venait d'Amérique. Certains éleveurs de la commune disaient même que ses vaches allaient mourir, s'amuse Claude Gasnier. Il s'investissait beaucoup pour l'agriculture. » En effet, dans les années 50, Raymond Gasnier est le président communal du syndicat des exploitants agricoles. « Il y avait une trentaine de fermes sur Echalou, aujourd'hui il n'y en a plus que deux ou trois. » En 1959, il crée et préside également la première Cuma du canton de Meissei. « Le premier investissement a été un congélateur collectif pour stocker de la viande. Il y avait 24 casiers pour une vingtaine de familles. Chacun payait une cotisation qui servait à l'amortissement. Ensuite, on a investi dans un épandeur à fumier, car beaucoup utilisaient encore la fourche. »

Initiateur du remembrement
Raymond Gasnier a raccroché les bottes depuis près de quarante ans. Il ne met cependant pas complètement l'agriculture de côté puisqu'il enchaîne deux mandats de conseiller municipal jusqu'en 2002. « Il a fait partie des initiateurs du remembrement des exploitations agricoles au début des années 90 », confie Claude Gasnier. « En 1982, mes 38 ha s'étendaient sur 66 parcelles. Le remembrement a été bénéfique pour l'agriculture, mais ça n'a pas été facile à mettre en place. Certains étaient pour, d'autres contre. Pendant les réunions, ça parlait fort », enchaîne Raymond Gasnier. L'ancien exploitant est conscient d'avoir été l'un des acteurs de « l'évolution incroyable » de l'agriculture au fil des décennies. Il ne compare pas les méthodes de production d'aujourd'hui à celles de son époque : « il faut vivre avec son temps. Et si j'avais 20 ans, je me réinstallerais. »

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