En grève de la faim dans sa caravane : il dénonce l'appétit des abatteurs
Thierry Thomas a installé sa caravane sur le parking de l'abattoir SOCOPA de Gacé (61). L'éleveur d'Argentan y a entamé une grève de la faim, lundi en début d'après-midi. Il dénonce "la crise qui dure dans la production de jeunes bovins et dans le monde de l'élevage en général".
Thierry Thomas a installé sa caravane sur le parking de l'abattoir SOCOPA de Gacé (61). L'éleveur d'Argentan y a entamé une grève de la faim, lundi en début d'après-midi. Il dénonce "la crise qui dure dans la production de jeunes bovins et dans le monde de l'élevage en général".
Thierry Thomas s'est installé sur un coin de pelouse avec sa caravane. Point de vacances pour l'éleveur. Un duvet, des bouteilles d'eau, un groupe électrogène et une télévision : le confort est minimal. L'homme a aussi sorti sa table de pique-nique et ses panneaux résumant ses revendications. L'agriculteur d'Argentan a entamé sa mobilisation lundi midi. Il a décidé d'agir seul, mais espère du soutien et des visites. Le geste est fort. Le gréviste de la faim attend des réponses. D'abord, il espère communiquer sur les problèmes financiers des engraisseurs. Thierry Thomas n'a pas fixé de durée à sa grève de la faim : "Pourquoi pas arrêter quand Jean-Paul Bigard, le président du groupe viendra manger avec moi ?"
Une lettre sans réponse
Le 20 avril, il a écrit au groupe Bigard. Ce courrier, sans réponse à ce jour, relatait les difficultés de son exploitation. En plus de Thierry Thomas, le GAEC compte 3 associés (Philippe Thomas, Thierry Hurel et Emmanuel Bloyet) au sein du GAEC des Blandinières. "Depuis environ 10 ans, nos revenus diminuent. La baisse s'est accélérée depuis 3 ans. Cela représente 100 000 EUR en moins en 2013 et 150 000 EUR en 2014. En 2014, nous avons vendu 980 bovins pour un chiffre d'affaires de 1,6 million d'euros. Mais, notre revenu est de 0", explique l'éleveur.
L'optimisation technique, sanitaire ou au niveau de l'alimentation ne suffisent plus. Le GAEC a été contraint de renégocier l'emprunt des bâtiments avec la banque. Le remboursement s'étale désormais sur 20 ans. "Nous n'avons plus de variables d'ajustement. Nous sommes au bout", estime Thierry Thomas.
Une responsabilité du ministre
Le GAEC subit l'effet ciseaux des prix et la survalorisation des broutards. Ces derniers sont achetés 1120 EUR pour 400 kg. "Le ministre de l'Agriculture porte une responsabilité. Il s'était engagé à aider les élevages à hauteur de 50 EUR par jeune bovin. Cette annonce a fait augmenter les prix des broutards. Même si finalement, aucun soutien n'est parvenu jusqu'à nous", juge l'agriculteur. Quand les jeunes bovins sortent de sa ferme, leur prix est descendu à 3,70 EUR kg. 70 centimes par kilo sont nécessaires pour pérenniser la filière, selon l'estimation des éleveurs. "Notre livre de compte est à disposition si le groupe Bigard souhaite voir nos propos étayés. Nous souhaiterions que Bigard se montre aussi transparent sur ses résultats financiers".
Produire ou pas
Thierry Thomas a cru dans ce système qui l'invitait à aller de l'avant. "Nous avons doublé nos capacités de production depuis 10 ans sous l'impulsion de vos directeurs (...) qui nous ont encouragés à aller de l'avant", indique le courrier adressé à Jean-Paul Bigard.
Installation d'un jeune
Avec Emmanuel Bloyet, le GAEC des Blandinières a installé un jeune. Il a remplacé un salarié au sein de l'association. Cependant pour permettre son installation, l'exploitation a été contrainte de s'agrandir. A tort ? Thierry
Thomas attend une réponse.
Anne-Marie Denis se dit "bouleversée"
Dès lundi soir, Thierry Thomas a reçu des visites de soutien de collègues, dont celle d'Anne-Marie Denis, présidente de la FDSEA de l'Orne, qui s'est dite "bouleversée par cette situation. Sur un plan humain, c'est un acte extrême qui en dit long sur la gravité de la situation dans laquelle sont plongés les éleveurs spécialisés en viande bovine. Nous avons mené au cours de ces derniers mois, et souvent avec Thierry en première ligne, diverses actions pour alerter les pouvoirs publics, les abattoirs et la grande distribution. Rien n'a bougé cependant. Puisse aujourd'hui ce cri de désespoir être entendu".