Erosion : la prairie, une leçon bien retenue
Dans le bassin côtier granvillais,un groupe d’agriculteurs travaille sur l’érosion des sols. Souvent imperceptible, la problématique a été évaluée à l'échelle de l'exploitation agricole. Quelquefois, après des épisodes pluvieux, la terre prend la route ou les rivières pour finir à la mer. Pour les exploitations agricoles, c’est une partie du capital qui prend l’eau. A Lolif (50), Jean-Luc Hardy veille sur son sol et notamment ses prairies.
Dans le bassin côtier granvillais,un groupe d’agriculteurs travaille sur l’érosion des sols. Souvent imperceptible, la problématique a été évaluée à l'échelle de l'exploitation agricole. Quelquefois, après des épisodes pluvieux, la terre prend la route ou les rivières pour finir à la mer. Pour les exploitations agricoles, c’est une partie du capital qui prend l’eau. A Lolif (50), Jean-Luc Hardy veille sur son sol et notamment ses prairies.
llll 30 tonnes de terres. C’est la masse de terre retrouvée à l’embouchure du Thar. Ce fleuve côtier naît à l'est de La Haye-Pesnel, et se jette dans la mer à Saint-Pair-sur-Mer dans la baie du mont Saint-Michel. Le Syndicat Mixte des Bassins Cotiers Granvillais a étudié l’impact de l’érosion. « Des pluies d’une dizaine de millimètres de juillet 2007 et février 2009 ont entraîné 30 tonnes de terres. Elles se retrouvent dans les eaux de baignades. Bien sûr ce chiffre est à prendre avec précaution. Car la terre retrouvée provient aussi des berges. L’influence des champs ne peut être distinguée. Mais, ce chiffre des 30 tonnes a permis d’interpeller. C’est sur cette base que nous avons créé un GIEE intitulé « Mon sol, j’en prends soin pour éviter l’érosion ». Nous sommes aujourd’hui une douzaine d’agriculteurs à échanger autour de cette problématique. La démarche est soutenue par l’Agence de l’eau », explique Alain Quesnel, éleveur et responsable du GIEE.
De 4 à 80 kg de terre perdus par hectare
D’autres essais, menés dans les parcelles d’Alain Quesnel,confirment cette tendance. Dans des champs à 6 % de pente, la perte de terre est 4 kg par hectare lorsqu’un couvert est implanté. Avec un sol nu, l’érosion atteint 80 kg par hectare. (Voir ci-contre)
Après s’être approprié les enjeux, les agriculteurs se sont mouillés. Depuis 2013, ils testent des modalités autour de leurs pratiques culturales. « Les leviers sont multiples. Certains systèmes culturaux s’avèrent plus ou moins favorables à l’érosion. Cette dernière est aussi influencée par la nature des sols ou les conditions météorologiques », insiste Marie Christine Fort, animatrice du GIEE. .
Érosion et productivité de la prairie
Installé à Lolif en production bio, Jean-Luc Hardy a joué le jeu du groupe. Le GIEE a étudié l’indice d’érosion de son exploitation. Son sol se révèle bien stabilisé. Ce résultat est obtenu grâce aux prairies. L’herbe couvre, en effet, 85 % de sa SAU. Ce résultat honorable n’a pas empêché l’éleveur de se remettre en question. Il a d’abord étudié la productivité de ses prairies. « Je manquais de rendement. J’ai finalement allongé mes écarts de retour de parcelle. Les vaches ne passent plus que 48 heures par paddock, contre 4 ou 5 jours précédemment. J’ai obtenu plus de fourrages et de meilleure qualité. Mes résultats m’ont encouragé à remettre des prairies en place ». La part du maïs dans l’assolement s’est donc réduite, de quoi limiter un peu plus l’érosion. Le producteur de lait n’oublie donc pas ses terres. « Tout part du sol », résume-t-il. Mais, l’agriculteur refuse toute modélisation de son système. La règle, c’est qu’il n’y a pas de règle... Les prairies restent en place 5-6 ans, voire beaucoup plus selon leur état. La rotation intègre ensuite du maïs, des céréales et du colza fourragers.
Un maïs bio sans labour
Le GIEE a également poussé Jean-Luc Hardy à réfléchir ses techniques culturales. « Dans le groupe, tous les systèmes sont représentés. Ma première motivation reste la curiosité. Mais, nous avons tous besoin de faire évoluer nos systèmes à travers un groupe de proximité ». Son expérience montre qu’un maïs bio sans labour s’avère possible. Jean-Luc Hardy utilise d’abord un outil à disque pour couper les couverts et réaliser un «mulch». Ensuite, il passe trois fois avec un outil à dents de type « canadien ». Le troisième passage s’effectue à 25 cm de profondeur. Le tracteur est lui équipé de roues jumelées afin de limiter le tassement.
Avec l’Herbasol, la prairie aussi est travaillée
L’éleveur soigne aussi la fertilité du sol de ses prairies. En CUMA, il a donc investi dans un Herbasol. L’outil lui revient à 12 € 50 par hectare engagé. Derrière cet achat, se cache une nouvelle fois la volonté de travailler la structure de ses sols. L’Herbasol est un décompacteur qui permet d’aérer les prairies. L’outil fissure le sol sur une quinzaine de centimètres, sans bouleverser les horizons. Des disques ouvreurs coupent la végétation, avant le passage des dents. Ensuite, des rouleaux ferment les sillons. « J’ai de nombreuses terres hydromorphes. L’Herbasol permet à l’eau et l’air de circuler afin que la prairie se développe ».
Au-delà de la terre, ces innovations et ces réfections nourrissent la motivation de Jean-Luc Hardy. « Nous devrons sans doute travailler jusqu’à 67 ans. Comment ? Nous devons également entretenir notre passion ».