Certification environnementale
HVE : le label met un pied dans l’Orne
La Chambre d’agriculture de Normandie a invité les agriculteurs à s’informer sur le label HVE au cours de trois réunions dans l’Orne. La certification environnementale, progressive et créée par l’Etat, est encore peu présente dans la région.
La Chambre d’agriculture de Normandie a invité les agriculteurs à s’informer sur le label HVE au cours de trois réunions dans l’Orne. La certification environnementale, progressive et créée par l’Etat, est encore peu présente dans la région.
En Normandie, la démarche HVE en est à ses débuts. Gilles Fortin, formateur à la Chambre d’agriculture, liste les démarches existantes dans diverses filières : la filière viticole, en avance ; l’exemple d’une coop vendéenne qui a labellisé 80 adhérents pour la création d’une filière baguette HVE. Le label concerne l’exploitation et non un atelier. Et la démarche peut être individuelle ou collective, avec des coûts de certification entre 300 et 400 euros par an pendant trois ans.
Le niveau 1
Pour l’obtenir, l’exploitant doit faire valider par un organisme agréé son bilan « conditionnalité » sur trois domaines : environnement, santé des végétaux, BCAE. À renouveler tous les ans.
La Chambre d’agriculture est habilitée à le valider.
Le niveau 2
L’agriculteur contacte un organisme certificateur qui s’assure de la conformité, durant trois ans, de l’exploitation avec un référentiel contenant 16 exigences de moyens.
« Il faut connaître les enjeux environnementaux de votre exploitation, précise Gilles Fortin, savoir expliquer vos pratiques ».
Le niveau 3
L’agriculteur doit atteindre un total de 10 points dans trois modules, quatre s’il est irriguant. Le module Biodiversité « n’est pas très compliqué à couvrir en Normandie, au regard du patrimoine paysager », note Gilles Fortin. Le 2e, sur la gestion des phytosanitaires, en revanche, est plus difficile à atteindre, notamment pour les céréaliers. « L’approche repose notamment sur la limitation des IFT (Indice de Fréquence des Traitements), herbicides et non herbicides, indique le formateur : on compare l’utilisation de l’exploitation par rapport à une moyenne régionale ». Enfin, pour le module Fertilisation, il s’agit d’ajuster au mieux le plan de fumure ou les épandages en cours de campagne culturale. Dans la philosophie du label, les précautions prises par l‘agriculteur pour sécuriser et réduire ses intrants sont valorisées. L’utilisation d’outils d’aide à la décision (OAD) apporte des points.
On en a parlé au moment des EGA, on en parle dans les négociations sur la PAC : la certification environnementale risque de devenir incontournable, mais les agriculteurs se demandent si elle sera synonyme de valorisation pour leurs exploitations.
Le label HVE est comme la petite bête qui monte, qui monte… et qui risque, un de ces jours, de chatouiller ceux qui ne l’ont pas. Sera-t-il obligatoire pour entrer dans les éco-régimes prévus dans la future PAC ? C’est une piste que le ministre de l’Agriculture lui-même laisse entendre.
Le label est déjà inscrit dans la loi EGAlim : les cantines scolaires doivent introduire 50% de produits issus de labels « durables » dans leurs assiettes en 2022. Dès 2021, les agriculteurs labellisés HVE seront exonérés des conseils stratégiques phyto et bénéficient d’un crédit d’impôt de 2 500 euros dans le cadre du plan de relance. Il permet d’accéder plus facilement à certaines aides d’investissement. Enfin, la Région Normandie prévoit d’aider les exploitations à se certifier.
Démarrage en Normandie
Parallèlement aux formations programmées dans la Région, la Chambre d’agriculture de Normandie a lancé la machine dans l’Orne en invitant les agriculteurs à des réunions d’information.
À Mortagne-au-Perche, mercredi 10 février, ils sont dix. Face aux explications du formateur Gilles Fortin, ils oscillent entre intérêt et scepticisme. Pour Nicolas Tison, responsable de la commission Environnement territoire à la Chambre d’agriculture, « le label HVE est reconnu sur le plan national, c’est un avantage par rapport aux petits labels locaux ». « Il valorise l’environnement, mais pas notre porte-monnaie », s’inquiète dans la salle un participant qui demande : « le miscanthus que je vends en direct, est-ce que je vais le retrouver sur le prix si je suis certifié ? » Question pratique d’un éleveur : « comment ça se passe au niveau de la collecte de mon lait ? » La certification concerne l’exploitation, mais la démarche doit être collective, dans les filières longues. « Il y a des bruits de couloir chez certains transformateurs qui laissent penser qu’il y aura une valorisation », révèle Nicolas Tison. Par exemple, côté NatUp ou Approvert
Reconnaissance
Pour Nicolas Tison, la certification répond à une évolution inévitable : « il y a une lame de fond sur les enjeux phyto, fertilisation, sur lesquels des évolutions sont nécessaires. Quel outil pour les construire ? Celui-ci offre un cadre et permet aussi de faire reconnaître ce qui est déjà fait ».
Laurent Jahandier est éleveur porcin au Pin-la-Garenne, membre d’une association d’éleveurs engagés dans une démarche avec une GMS : « le contrat intègre un plan de progrès. On a 4 ou 7 ans pour atteindre les objectifs, bien-être animal, autonomie énergétique, etc. »
Pour lui, le HVE, « il faut y aller. On a toujours envie de faire mieux et on a besoin de reconnaissance, on en manque ». « C’est une manière de montrer ses bonnes pratiques de manière structurée », abonde Gilles Fortin.
Si la valorisation directe reste à inventer, au-delà de certains circuits courts, les gestes du gouvernement en faveur de la certification montrent des intérêts indirects à adhérer. La HVE, une petite bête à suivre de près.