Interview
Jean-Baptiste Goutte, président de JA 61 : " J’ai conscience de l’importance du réseau "
Jean-Baptiste Goutte, 30 ans, est cultivateur dans le Perche. Le président des Jeunes agriculteurs de l’Orne apprécie les relations humaines et la force du syndicat. Il est adepte de la devise : « si on veut faire entendre ses positions, il faut savoir prendre des responsabilités ».
Jean-Baptiste Goutte, 30 ans, est cultivateur dans le Perche. Le président des Jeunes agriculteurs de l’Orne apprécie les relations humaines et la force du syndicat. Il est adepte de la devise : « si on veut faire entendre ses positions, il faut savoir prendre des responsabilités ».
>> Jean-Baptiste, qui êtes-vous ?
Je suis petit-fils d’agriculteurs. Mon père travaille à la Chambre d’agriculture de l’Orne, ma mère est professeure des écoles. Après le collège, je ne suis pas allé vers un bac général car je ne suis pas très scolaire ; je suis plutôt du genre à réviser à la dernière minute (sourire). Mais ça ne me dérange pas, j’arrive à être efficace. J’ai donc suivi un Bepa puis un bac pro CGEA à Sées. Mes grands-parents ont gardé la ferme pour que je m’installe après eux : mon grand-père a fait du rab quand j’étais au collège. Puis ma grand-mère a pris sa place, mais elle est décédée. C’est allé vite. J’étais en dernière année d’étude, le salarié à l’époque arrêtait. C’était le bazar. Il y avait 60 Charolaises, alors je faisais la route pour aider mon grand-père. J’ai eu la chance que mon père et mon oncle montent une SCEA en tant qu’agriculteurs non exploitants et m’embauchent comme salarié pour garder la ferme. À côté, je travaillais l’été et l’automne dans une ETA, où je faisais la saison de battage, les semis et le ramassage des pommes. Puis je suis devenu salarié à temps complet de la ferme avant de m’y installer, seul, le 1er mai 2014.
>> Qu’avez-vous changé à votre installation ?
J’ai repris 25 ha il y a trois ans. La ferme compte 160 ha maintenant. Comme je n’arrivais pas à gérer les deux ateliers de façon performante, j’ai choisi de mettre la priorité sur les céréales. Le cheptel n’était pas aussi bon qu’il aurait dû l’être. J’ai quasiment arrêté les naissances et les vaches. J’ai juste gardé quelques génisses à l’engraissement pour valoriser les 30 ha d’herbage. Je veux être maître de ma production : je stocke les céréales à la ferme, je diversifie mes approvisionnements. J’ai pour projet de développer le stockage dans les anciens bâtiments d’élevage. Avec du recul, je pense que j’aurais aimé voir davantage de choses, découvrir d’autres domaines agricoles.
" Avec JA, j’ai vraiment progressé en tant qu’Homme. Je suis quelqu’un de facile et de pas contraignant, mais j’ai appris."
>> Comment avez-vous commencé JA ?
Un JA du canton de Bellême m’a proposé de venir à l’AG locale en 2009. Mon père faisait une intervention. C’était sympa, j’ai pris une cotisation. L’année suivante, j’ai été élu administrateur sans même me présenter ni être à l’assemblée générale. J’ai observé pendant deux ans, j’ai appris au fil des réunions sur l’installation, la PAC, etc. J’étais encore salarié à l’époque. Au mandat suivant, les gars du canton arrivaient en limite d’âge. On était quatre, personne ne voulait être président. La soirée JA risquait de tomber à l’eau, la bonne ambiance aussi. Je me suis dit : on ne peut pas critiquer et ne pas s’engager. Alors je me suis présenté pour que le réseau vive et j’ai été élu. J’ai participé aux réunions, pris mon rôle au sérieux. Guillaume Larchevêque était président de JA 61. Deux ans plus tard, je suis entré dans le bureau départemental sous la coprésidence de Damien Louvel et Alexis Graindorge. Après son mandat seul, Alexis ne repartait pas comme président. Il a été élu à la tête de JA Normandie et m’a demandé si je voulais bien prendre la présidence dans l’Orne. J’appréhendais, je ne m’en sentais pas capable mais comme Blandine voulait bien être secrétaire générale et qu’une bonne équipe était en train de se constituer, j’ai accepté.
>> Comment voyez-vous ce nouveau rôle de président, en binôme avec la secrétaire générale ?
Le président doit faire vivre le réseau. Être fédérateur, donner l’exemple, être le premier à s’impliquer. Avec Blandine, on se connaît depuis longtemps et on s’entend bien, on est ouvert d’esprit et complémentaires : elle est une ancienne commerciale et technicienne d’élevage installée en lait, moi je suis céréalier. Elle a le côté sérieux, et sait taper du poing sur la table quand il faut. Moi, j’ai l’habitude d’être en retard, ça ne me stresse pas car j’aime bien la dernière minute. Je sais que Blandine fait en sorte qu’on avance. Le bureau compte deux femmes, c’est très bien car on ne pense pas toujours pareil, elles apportent une autre réflexion. C’est positif dans un monde agricole qui se féminise.
>> Et avec la FDSEA, comment travaillez-vous ?
On n’a pas toujours les mêmes méthodes et nous avons nos points de vue. Mais j’ai de très bonnes relations avec la FDSEA et Anne-Marie, qui est très performante dans tout ce qu’elle entreprend. Elle est un personnage fort en caractère et se donne les moyens d’aller au bout de ses ambitions. Même si on n’est pas toujours d’accord, sur le fond, on défend la même chose. Il faut parfois que chacun lâche un peu pour trouver une solution finale qui va à tout le monde. Nous devons tout faire ensemble pour être plus forts demain et revendiquer nos opinons.
>> Quels sont vos envies, vos challenges pour les deux années de mandature ?
Donner une meilleure image du monde agricole. La confrontation citadins vs ruraux m’agace profondément. Les gens sont lassés du système ancestral, la société de consommation veut du + bio, + vert, + sain. Mais montrons qu’il n’y a pas mieux dans le monde que ce que nous faisons en France. Les gens comme Hugo Clément se servent de leur profession pour véhiculer un message personnel et influencent le grand public. Il faut que le monde agricole transmette les bonnes informations. Ça passe aussi par la vigilance des agriculteurs, car on paie cash le moindre faux pas. Nous devons être irréprochables et consciencieux dans notre travail.