La Normande sous les projecteurs
Pourquoi le monde agricole est-il me?connu d'une certaine population ? Thierry Carlier ne s'est pas pose? la question, il a directement pris la came?ra. « Vachement normande» est un documentaire qui traite de la vie agricole au quotidien. Le 27 fe?vrier a? 23 h 40 sur France 3, les Normandes de Barbara Paris seront sous les projecteurs.
" L'objectif était de parler de l'agriculture d'une manière différente de ce que l'on voit habituellement. Le profil de Barbara est assez atypique, c'est une jeune éleveuse à part entière ", souligne Thierry Carlier, réalisateur du documentaire " Vachement Normande ". Chez Barbara Paris, la ferme n'est ni bio, ni grande, simplement de taille moyenne.
Une race, un métier
" La race Normande est plutot méconnue du grand public, elle est souvent confondue avec la Holstein. Mon but était aussi de faire la promotion de cette race qui le mérite amplement ", admet le réalisateur. L'homme a toujours cherché une porte d'entrée pour réaliser un film sur l'agriculture. Très vite, un ami à lui le pousse à faire découvrir la race. En mai 2015, Thierry Carlier rencontre Barbara Paris. Cela ne faisait qu'un mois que la jeune femme était installée sur l'exploitation familiale. Grâce à sa forte passion pour la race, mais aussi à son caractère bien trempé, le réalisateur décide que Barbara serait le personnage central de " Vachement Normande". " C'est une autre manière de présenter l'agriculture. Le film est positif mais montre aussi les difficultés que rencontre le métier. La passion qui baigne en ressort très vite. C'est ce que j'ai voulu transmettre ", déclare-t-il. Pas de caricature ni de cliché. Simplement 52 minutes de vie réelle passée aux côtés de cette jeune fille, dévouée et amoureuse de son travail. Le début du tournage a commencé en janvier 2016 et a duré toute une année. Sur 23 jours, Thierry Carlier a tourné plus d'une soixantaine d'heures d'images. " Je dis souvent que le journaliste va à la chasse. Il tire sur tout ce qui bouge. Moi, je dis que je vais à la pêche. J'attends patiemment que les choses rentrent dans le cadre ", s'amuse Thierry Carlier.
Quand le réel rattrape la fiction
En effet, lorsqu'il rencontre Barbara, la crise n'a pas encore touché l'élevage. " C'est la crise qui s'est invitée dans le tournage. Ce n'était pas prévu qu'on l'évoque à la base. Malheureusement, on ne pouvait ne pas en parler ", explique l'homme. " Vachement Normande " n'est donc pas qu'un film sur la race et sur la passion du métier. Il montre aussi les difficultés traversées par la profession au quotidien du noble métier de paysan. " Je vis mon travail avec passion mais il ne faut pas croire que c'est un monde de bisounours ", explique la jeune femme.
Des personnages à part entière
" En toute modestie, pour qu'un film soit réussi, il lui faut 4 critères essentiels. Il doit apprendre des choses, avoir de l'émotion, de l'humour, et de réels personnages. Je pense que ce documentaire les regroupe ". Avec un caractère bien à elle, Barbara Paris est le personnage dont avait besoin le réalisateur. Passionnée depuis toute petite, la jeune fille a une formation bien solide et les pieds sur terre. " Nous sommes de grands passionnés de la race dans notre famille. La passion du métier en tant que tel est aussi très forte ", explique-t-elle." Barbara n'était pas facile à " apprivoiser ". J'ai dû passer beaucoup de temps à la mettre en confiance. Ce sont de beaux personnages qui sont présents dans ce film ", enchérit le réalisateur. Une approche différente par rapport à ce que l'on voit d'habitude dans les médias et des personnages émouvants. De bonnes raisons pour se mettre devant son poste le 27 février à 23h40 sur France 3.
Interview
Barbara Paris, 25 ans, éleveuse de Normande dans le Bessin (14)
" Trop de personnes ne connaissent rien à l'agriculture et ce n'est pas forcément de leur faute "
/// Barbara Paris a accueilli une équipe de tournage. Pendant un an, l'équipe a filmé le quotidien de la jeune femme.
>> Parlez-nous de votre parcours professionnel ?
J'ai fait un bac STAV au lycée Le Robillard puis un BTS productions animales à St-Lô (1 an en Angleterre et 1 an en France). Ensuite, j'ai commencé une licence qui n'a pas abouti. J'ai donc fait un certificat de spécialisation (CS) des produits fermiers. Après cela, j'ai commencé à travailler sur la ferme mais ma 1ère tentative d'installation n'a pas abouti. J'ai été deux ans inséminatrice pour finalement m'installer avec une associée (cette dernière est restée 6 mois) sur l'exploitation.
>> Comment arrivez-vous à gérer la ferme de nos jours ?
Malheureusement, à cause de la conjoncture, je ne peux embaucher un salarié. Heureusement mon ami travaille à l'extérieur et m'aide sur l'exploitation ainsi que mon père qui est à la retraite. Seule, je pense que je ne m'en sortirais pas.
>> C'est compliqué d'être une femme dans ce métier ?
Non pas spécialement. Aujourd'hui il y a de plus en plus de femmes dans le monde agricole. C'est comme partout, il faut réussir à faire sa place au départ.
>> Votre passion pour le métier est-elle plus forte que la conjoncture qui touche la profession ?
Oui bien sûr ! Après il faut savoir que j'ai repris un élevage qui était sain. C'est une ferme familiale donc j'ai eu des opportunités que je n'aurai pas eues ailleurs. Cependant, il ne faut pas que ça continue comme cela car la passion a aussi ses limites. Je ne veux pas être esclave.
>> Est-ce ce que vous avez peur pour l'avenir de la profession ?
J'ai peur de la tournure que cela prend. Les réactions ne sont pas forcément les meilleures. Des exploitations s'agrandissent et s'intensifient alors qu'elles n'ont pas forcément les moyens de le faire.
>> Est-ce qu'être agriculteur de nos jours, c'est être communiquant ?
Bien sûr. Trop de personnes ne connaissent rien à l'agriculture et ce n'est pas forcément de leur faute. Il faut ouvrir nos exploitations et aller à la rencontre des personnes.
>> Pourquoi êtes-vous tombée amoureuse de la Normande ?
Depuis toute petite, j'ai grandi avec cette race. C'est une race locale, rustique et très facile à vivre. Elle a beaucoup de qualité, elle produit de la bonne viande et du bon lait. Elle a aussi un super caractère.
>> Pourquoi faut-il être devant sa télévision le 27 février à 23h40 ?
Il faut le voir car ce documentaire montre où en est l'agriculture aujourd'hui tout en gardant l'espoir que l'élevage a de l'avenir.
>> 2017 va être une année politiquement chargée, que pouvez-vous nous dire concernant cela ?
J'ai peur de l'extrémisme dans la profession. Je ne veux pas critiquer mais les gens sortent peu dans notre métier. Il faut surtout rester ouvert d'esprit et ne pas se tourner vers les extrêmes.