Le nouveau Préfet du Calvados aux champs : pour pulvériser les idées reçues
Répondant à l’invitation de Jean-Yves Heurtin, président de la Chambre d’agriculture du Calvados, Philippe Court, nouveau Préfet, a chaussé les bottes pour une visite d’exploitation. Quelques idées reçues ont été pulvérisées.
C’est sans cravate, mais en bottes, que le nouveau Préfet du Calvados a visité, samedi dernier à St-Martin-de-Fontenay, l’exploitation d’Olivier Frimout. Une prise de contact conviviale entre la profession agricole et le représentant de l’Eat durant laquelle de nombreux sujets ont été abordés : fin des betteraves sucrières, consommation foncière, dégâts de gibier, ZNT, circulation, eau...
Du colza à la place de la betterave
A l’instar de tous les planteurs du bassin de Cagny, c’est avec regret qu’Olivier Frimout voit la betterave sucrière quitter son assolement. Ce sont 17 ha de colza qui viendront combler ce vide agronomique sans combler pour autant le vide économique. Les marges sont loin d’être comparables. Autre dommage collatéral : où trouver et à quel niveau de prix le sous-produit (la pulpe) qu’il utilise l’hiver pour nourrir son troupeau de bœufs et de vaches allaitantes ? « La betterave sucrière, c’est 2 300 e de marge brute à l’hectare. Une culture vertueuse où le désherbage mécanique était en plein développement. Sur ce dossier, la profession s’est sentie lâchée par l’Etat », a résumé Jean-Yves Heurtin, président de la Chambre d’agriculture.
Quant à un éventuel projet de construction d’une nouvelle sucrerie évoqué par Philippe Court, Geffroy de Lesquen (élu chambre et par ailleurs administrateur du syndicat betteravier) a réalisé un point d’étape sachant, qu’en tout état de cause, il nécessitera du temps, de gros investissements et un alignement des planètes presque parfait. Et Geffroy de Lesquen de regretter au passage que « Süducker ferraille son usine alors qu’on aurait pu créer une unité de déshydratation de luzerne ».
Aux portes de Caen, la consommation foncière s’est naturellement invitée dans les débats. Jean-Yves Heurtin a tout d’abord avoué ne pas comprendre la décision de l’Etat de retirer le droit de vote à la profession au sein de l’Epfn (Etablissement public foncier de Normandie). Pour autant, le président de la Chambre d’agriculture n’est pas contre l’urbanisation « mais exige que chaque hectare consommé ait une vraie fonction économique ». Entre autres réponses, le Préfet a souligné sa volonté de privilégier « la rénovation de l’habitat existant avec les aides fiscales qui vont avec ».
Le test des lunettes
A quelques semaines des municipales, le dossier ZNT (Zone de non-traitement), qui impacterait 3 000 ha dans le Calvados, a constitué un met de choix. Son approche a été très pragmatique. Guidé par Geffroy de Lesquen, Philippe Court est monté sur un pulvérisateur automoteur pour une explication de texte sur le bas-volume et la coupure de tronçon. Il s’est penché sur la buse anti-dérive en pratiquant le test des lunettes. Pour la profession agricole, l’avenir se situe « dans une charte de bon voisinage ». Les élus de la Chambre et du syndicalisme ont d’ailleurs rencontré l’union des maires du Calvados le 20 décembre dernier et doivent discuter ce jour avec elle « sur une feuille de route. L’accueil est très favorable. Nous espérons également intégrer les réseaux de formation des nouveaux maires pour les sensibiliser sur leur pouvoir de police et le rôle de médiateur qu’ils doivent assumer », précise Jean-Yves Heurtin. Et concernant l’agribasching et les intrusions de plus en plus féquentes dans les élevages, c’est à l’Etat de faire respecter la loi.
Le sanglier en mars
Autre sujet évoqué : les dégâts de gibier et plus particulièrement ceux causés par la surpopulation de sangliers. 5 200 animaux sont à prélever à l’année.
Pour atteindre cet objectif, une prolongation de la période de chasse à mars est à l’étude. " Il faut éviter une logique patrimoniale du gibier ", préconise Philippe Court qui prend ce dossier à bras-le-corps. En Ardèche où il a officié dans le passé, 26 000 sangliers sont prélevés chaque année.
Un département où il avait autorisé le tir de nuit. Impossible dans le Calvados où " il existe des zones de non-chasse plus particulièrement dans le pays d'Auge ", a souligné Clément Lebrun.Du boulot pour les louvetiers qui ont vu leur effectif passer de 5 à 8.