A10 kilomètres de Caen
Maltot exauce le vœu de la ruralité
Maltot, pour ceux qui ne connaissent pas, c’est son château, sa MFR et son Bœuf en fête. La commune compte 1 095 habitants, se situe à dix kilomètres de Caen. Elle abrite quatre sièges d’exploitations agricoles, dont trois sont repris par des trentenaires, qui contribuent à l’équilibre des mondes urbains et ruraux. Circuits court, vie locale et bonne ambiance s’imbriquent dans la commune. Visite guidée, au lendemain de la phase 2 du déconfinement.
Maltot, pour ceux qui ne connaissent pas, c’est son château, sa MFR et son Bœuf en fête. La commune compte 1 095 habitants, se situe à dix kilomètres de Caen. Elle abrite quatre sièges d’exploitations agricoles, dont trois sont repris par des trentenaires, qui contribuent à l’équilibre des mondes urbains et ruraux. Circuits court, vie locale et bonne ambiance s’imbriquent dans la commune. Visite guidée, au lendemain de la phase 2 du déconfinement.
En 1917, René de Bourmont fait un vœu avant de mourir sur le front : que Maltot contribue à la formation des jeunes ruraux qui se détourneront peut-être de l’agriculture. Ce dernier laisse un château, qui cent ans plus tard, abrite 400 jeunes en formation agricole et rurale.
MFR, Le Château
« Je suis arrivé le 1er août 1966, à 21 ans, à Maltot pour donner des cours au centre de promotion social, remonte Rémy Guilleux, aujourd’hui retraité de l’enseignement agricole. Nous appartenions déjà au réseau des MFR. » L’étudiant salarié est devenu enseignant formateur, puis directeur de la structure, puis directeur départemental des MFR puis directeur de l’ex Basse-Normandie. « La MFR fait connaître le village : elle accueille des jeunes adultes, de la 2de au bac +4. C’est un vrai lieu d’animation pour le monde agricole et le grand public. Le Bœuf en fête, organisé par la MFR avec le soutien de la commune, attire 6000 à 10 000 personnes », salue Rémy Guilleux. Sophie Theunynck, directrice de la MFR, corrobore : « nous nouons des relations étroites avec les habitants, notamment les agriculteurs. Ils nous apportent du matériel pour Bœuf en fête. Des agriculteurs du village accueillent des classes dans leur ferme pour des démonstrations de matériel ou des visites ».
La mairie, place Charles-Vauvrecy
Rémy Guilleux, qui a changé de postes mais n’a jamais déménagé de Maltot, a commencé la vie municipale en mars 1989, sous le mandat de Hubert Philippe, comme conseiller. Il est élu maire en 2008 et entame, en 2020, son troisième mandat. « Il faut du temps pour être maire, je voulais être retraité. Les habitants attendent de l’écoute, de l’attention. Cela contribue à la bonne ambiance de la commune. Je suis le 8e d’une fratrie de neuf enfants. La vie m’a offert des milliers de rencontres. Les relations humaines sont notre première richesse », analyse l’édile. Il illustre : « les événements de la MFR prennent tout leur sens pour la vie du village. Ils apportent de la reconnaissance au monde agricole et rural, du lien avec les urbains qui découvrent les réalités de la profession. Ils ramènent les urbains à la relation avec le vivant, animal ou végétal, en évolution permanente. Les habitants comprennent que le monde agricole n’a pas que des défauts. Les agriculteurs ne sont pas pollueurs mais apportent du positif. La présence d’exploitations dans un village, à la périphérie d’une ville, est essentielle à l’équilibre des mondes urbains et ruraux. »
Viande rouge rue Dorset, viande blanche rue de l’Église
Maltot compte quatre sièges d’exploitations agricoles. Celle de Maurice Philippe dans la rue principale - la rue Dorset - se situe à quelques centaines de mètres de la mairie. Elle est voisine de la MFR. Maurice Philippe, qui dirige également une entreprise de travaux agricoles, est la troisième génération d’agriculteurs sur l’exploitation. « Je suis né à Maltot et je passerai ma retraite ici », assure le premier adjoint au maire. L’agriculteur va prochainement passer la main à ses deux filles : Mélanie, 36 ans et Stéphanie, 32 ans. Il cède son exploitation de 320 ha et sa production allaitante. « J’élève une quarantaine de Blondes d’Aquitaine. Un animal est consacré à la vente directe tous les mois. » Ses filles souhaitent développer cette partie de l’activité, aussi bien en viande qu’en maraîchage. « Nous avons planté des navets, des pois chiches et du persil. Les gens sont demandeurs de légumes de saison. » De l’autre côté du village, au 12 rue l’Église, Hubert Rousseaux élève volailles et moutons en plein air, qu’il commercialise « en vente à la ferme, depuis 1990. Je ne vends qu’aux particuliers. J’ai un labo pour préparer la charcuterie. Les clients sont du coin, ils viennent aussi de Caen. Maurice Philippe vient me faire la moisson. Je lui achète des oignons et des échalotes pour la charcuterie. » L’homme de 63 ans est installé sur 98 ha, en prairies et céréales, tout en location. Il espère que sa fille reprendra l’exploitation après lui. Si ce n’est pas le cas, il promet de « tout faire pour que des jeunes s’installent. Je ne veux pas que ma ferme serve à en agrandir une autre. C’est niet ! Il faut des jeunes pour maintenir le tissu rural ».
Rue Fontaine, du pain et des patates
Thibaud et Caroline Vauvrecy sont installés en face de chez Jean-Marc Bellenger, rue Fontaine, à l’entrée du village. Le couple a repris l’exploitation familiale, céréales et chevaux, en 2008. Une expropriation de terres les pousse à trouver une diversification pour garder leur salarié. « On s’est lancé dans la transformation de céréales. On a écrasé notre premier grain de blé en 2011. » En octobre 2019, ils ouvrent le Moulin de Thibo et Caro, où l’on trouve du pain, des pâtes, de la farine mais aussi de la crème, de la viande ou encore de la bière du coin. « On transforme 20 à 25 % de nos céréales. On a gardé notre salarié et embauché trois personnes, se félicitent les jeunes repreneurs. Le point de vente permet aux gens de se croiser, de se rencontrer. » De l’autre côté de la route, Jean-Marc Bellenger a repris la suite de son père Francis. Sa mère et lui sont cultivateurs et consacrent 6 ha de pommes de terre à la vente directe. « Mes parents sont installés depuis 1976. J’ai repris l’exploitation en 2012. Le Moulin de Thibo et Caro vend une partie de nos pommes de terre, sans concurrence avec les Philippe : quand on n’a plus de stock ou pas la variété demandée, on envoie les clients rue Dorset », indique Jean-Marc Bellenger.
L’équilibre de vie à Maltot
Si les exploitants s’entraident et partagent du matériel, le maire a su faire cohabiter ruraux et urbains. « Il y a dix ans, nous avons organisé une soirée avec la Chambre d’agriculture entre les exploitants et les habitants des lotissements. Les gens sont repartis en se disant qu’il y avait beaucoup de choses qu’ils ignoraient. Il faut provoquer les occasions de créer du lien. Les circuits courts y contribuent. La connaissance des uns et des autres est fondamentale. Quand les gens se savent écoutés, qu’ils se connaissent, tout se passe mieux », assure le maire. Si la Covid-19 a confiné les Français chez eux, le maire se dit frappé par l’effet circuit court : « les gens découvraient nos extraordinaires producteurs du coin ». Même constat du côté des exploitants : « nos ventes à la ferme ont augmenté de 20 à 25 % », estime Maurice Philippe. Grâce à la diversité des quatre exploitations, Thibaud et Caroline Vauvrecy constatent : « pendant le confinement, les Maltotais étaient en autonomie alimentaire ». Cent ans après, alors que les modes de vie ont changé mais qu’une pandémie a mis le monde a l’arrêt, le vœu de René de Bourmont continue d’être exaucé. Et reste d’une actualité indispensable.