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L’interview de Benoît Hulmer, élu Chambre d’agriculture de la Manche
" Nous nous engageons à faire vivre la haie "

Il y a un peu moins de deux ans, des agriculteurs membres du GIEE Energie, dans la Manche, se penchent sur le marché du carbone. Ils dealent, avec le Conseil départemental, l’entretien de haies contre le stockage de carbone. Une convention doit être signée avant la fin de l’année.

GIEE Energie Benoît Hulmer
Benoît Hulmer (à gauche) et Eddy Cleran, conseiller gestion du bocage à la Chambre d’agriculture.
© DR

>> Comment cette idée vous est venue ?
A l’origine, le GIEE Energie a été créé pour chercher des économies d’énergie dans les fermes. J’ai entendu des échos comme quoi le carbone génère des milliards d’euros par an. Nous, paysans, en stockons. Quand je suis arrivé dans le groupe, j’ai proposé qu’on essaie de valoriser le carbone stocké comme service rendu à l’environnement. En parallèle, le Conseil départemental veut se décarboner, devenir vertueux. Sept exploitations du GIEE s’engagent à stocker du carbone sur 65 km, pour dix ans.

>> Quels sont les critères du Conseil départemental ?
Le Département souhaite des haies multi-strates, des taillis, des bois de cinq mètres, des arbres. Si les haies comportent des trous, qu’ils soient compensés ou bouchés. L’idée, c’est de gérer les haies en bon père de famille. Chaque exploitation peut engager maximum dix kilomètres de haie. Personnellement, j’ai engagé plusieurs kilomètres de haie. Le Conseil départemental ne voulait pas de jeune haie, ni en bord de route ni partagée avec des voisins. Nous faisons nous-mêmes les propositions, mais le Département peut nous retoquer.

>> Concrètement, comment ça se passe ?
Le conseiller bocage de la Chambre vient dans nos exploitations et établit un plan de gestion, c’est-à-dire un inventaire et un diagnostic des haies, qui répond aux conditions demandées par le Département. il consigne le linéaire, les essences, les types de haies, la classification, la longueur, l’âge. Le plan de gestion de la haie court sur dix ans. Le Conseil départemental nous rémunère pour l’entretien mécanique des haies (lire article ci-contre), réalisé par des ETA, des Cuma ou nous-mêmes. Nous nous engageons à faire vivre la haie.

>> Quels sont les bénéfices ?
Beaucoup d’agriculteurs perçoivent la haie comme une contrainte : il faut l’entretenir, la couper. C’est du temps et de l’argent. Si on n’est pas dans une démarche de filière bois, c’est très dur de la valoriser.
Ce partenariat permet de rémunerer notre travail d’entretien. Il permet aussi le maintien des haies bocagères, à la fois pour le stockage du carbone, mais aussi pour
préserver le paysage, la biodiversité. Les haies assurent une protection aux animaux, servent de clôtures des pâtures. L’objectif du projet est
que le service rendu à la collectivité soit rémunéré aux agriculteurs par le Département. Nous devons signer une convention d’ici la fin de l’année.

>> Une première étape vers plus de partenariats ?
Nous sommes encore dans une phase expérimentale. On espère généraliser. L’idée, ensuite, serait de travailler avec des entreprises qui souhaitent avoir une démarche environnementale. La Chambre d’agriculture proposera des linéaires de haies en échange de contribution financière, en accord avec les agriculteurs. Dans l’idéal, la Chambre aura son catalogue de haies.

>> Quel message souhaitez-vous faire passer ?
C’est une démarche innovante. Pour que ça fonctionne, nous devons avoir un cahier des charges concerté et adapté, avec des recommandations et des engagements. C’est une première porte ouverte à la discussion avec les EPCI et les entreprises du territoire. Si on veut maintenir le bocage et privilégier l’élevage aux cultures, il faut que les agriculteurs puissent valoriser l’entretien des haies et leurs coupes. Pour cela, les collectivités, en investissant dans des chaudières à bois ou dans des projets comme le nôtre, ont un rôle essentiel à jouer.

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