Orne : Noël au balcon, «coeur de gamme» en rayon ?
A la veille de Noël, une délégation FDSEA - JA d'une vingtaine d'éleveurs viande bovine s'est rendue en grandes surfaces pour une piqûre de rappel. Les grandes enseignes se sont engagées dans la démarche «coeur de gamme» mais certaines trainent du rayon quant à la mise en application.
«En signant il y a quelques semaines la démarche «coeur de gamme», Carrefour au niveau national a voulu acheter la paix sociale mais l'amnésie prévaut. Leurs magasins trouvent toujours de bons prétextes pour dévier du chemin. A nous de les remettre dans le bon sens». Pour Thierry Thomas, éleveur à Mauvaisville (61), le constat est sans appel : les engagements ne sont pas tenus. Et Dominique Bayer, responsable de la section bovine FDSEA, de lui emboîter le pas. «Sur le rayon premium de Carrefour, nous n'avons rien à dire. Sur sa démarche FQRN (Filière Qualité Race Normande), qui d'ailleurs pourrait intégrer la démarche «coeur de gamme», non plus. Mais sur le «coeur de gamme», on est très loin des 50% annoncés».
Du côté de JA (Jeunes Agriculteurs), la pilule est également amère. «Nous sommes le premier maillon de la chaine alimentaire mais nous n'arrivons pas à vivre de notre métier. Et que l'on ne vienne pas nous dire que c'est la faute du consommateur qui mange moins de viande. Tous les animaux en ferme, quelle que soit la catégorie, partent sans délai. La demande est bien là».
Par cette action menée en Alençon le 21 décembre dernier (Carrefour mais aussi Leclerc), FDSEA et JA ne réclament pas une aumône de quelques centimes qui ne changerait rien à la situation de fonds. «C'est une nouvelle relation commerciale que nous souhaitons développer avec la grande distribution», insistait il y a peu Pierre Vaugarny (secrétaire général de la FNB).
La démarche «coeur de gamme» intègre les coûts de production. Elle se traduit par une juste revalorisation de plusieurs centaines d'euros par animal.
Dans le Maine-et-Loire
Si les éleveurs ornais attendent encore le bon vouloir des distributeurs, leurs voisins du Maine-et-Loire semblent mieux lotis.
«Sur 8 vaches vendues depuis le mois d'août, 2 l'ont été en «coeur de gamme». J'ai touché un complément de prix de 0,52 cts/kg de carcasse sur ces deux vaches si je compare avec les autres vaches vendues sur la même période. Le prix de vente de l'animal est donc très intéressant», témoigne Hugues Lemesle, éleveur de Limousines à La Pouëze (49). «Mais pour le moment, trop peu d'animaux sont valorisés «coeur de gamme» pour redonner une bouffée d'oxygène sur nos exploitations. Nous connaissons les animaux qui correspondent au cahier des charges dans nos élevages, mais il n'est pas
possible d'anticiper s'ils seront commercialisés en «coeur de gamme» ou non. Il faut donc rapidement une montée en puissance.» Montée en puissance qui dépend du bon vouloir de la grande distribution. Il y a les mauvais élèves visités mercredi 21décembre dans l'Orne mais ailleurs quelques bons. A titre d'exemple, l'enseigne Système U dans le Maine-et-Loire a engagé 26 magasins avec des résultats : 254 demi-carcasses commercialisées sur août-septembre 2016 et 323 demi-carcasses d'animaux identifiés 49.
«Faites le même effort,» invitent FDSEA et JA s'adressant aux directeurs Carrefour et Leclerc d'Alençon. Sinon ? «Nous reviendrons, plus nombreux, et sans doute dans un autre état d'esprit».