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Semis du maïs : ne pas se précipiter…

Les semis de maïs vont démarrer très prochainement. Les sols sont actuellement en train de se réchauffer et se sont ressuyés au cours du mois de mars. Toutefois, les pluies récentes ont pu saturer à nouveau les sols en eau...

Avant toute intervention dans les parcelles, il faut bien attendre un ressuyage en profondeur (diagnostic à la bèche) et adapter le travail du sol à chaque parcelle. L’implantation de la culture est une étape cruciale à ne pas négliger, il est important d’obtenir une levée régulière et d’assurer un lit de semence sans discontinuité. Voici un état des lieux des conditions d’implantation du maïs pour les semis 2016 et un rappel des solutions de protection disponibles contre les ravageurs du maïs.


Avant le semis : détruire les couverts et épandre les engrais de ferme

La destruction des couverts d’interculture doit avoir lieu au moins 1 mois et demi avant la date d’implantation envisagée pour le maïs, dans le respect de la réglementation Directive Nitrate. Des couverts développés comme cette année sont plus difficiles à détruire et empêche le ressuyage des sols. Dans le cas d’une exploitation d’une culture en dérobée (trèfle-ray-grass), il faut veiller à ne pas récolter trop tard pour limiter les effets dépressifs sur le maïs vis à vis de la disponibilité en eau et en minéraux. D’un point vue valorisation fourragère, il faut aussi veiller au stade de récolte. Pour optimiser la qualité du trèfle-RGI vis-à-vis des UFL et de la MAT, le stade de récolte est tout début épiaison des graminées, stade qui approche. Si l’objectif est d’optimiser la quantité de fourrage, le stade de récolte est plutôt mi à fin épiaison.L’épandage des fumiers doit se faire également dès que possible (sur sols bien ressuyés !) et au moins un mois avant le semis afin d’éviter des effets dépressifs. Si un apport de lisier est prévu, il se fera au plus proche du semis. L’objectif est de mettre l’azote à disposition du maïs lorsqu’il en a le plus besoin : à partir de 10 feuilles. Afin de limiter la volatilisation ammoniacale, épandre en conditions de vent faible, avec prévision de pluie dans les 24 h et incorporer si possible au plus vite après l’apport.

Apports de lisier : enfouir le plus vite possible pour limiter la volatilisation d’ammoniac

Un temps sec et venteux est très favorable à la volatilisation de l’azote des engrais organiques riches en azote ammoniacal. Pour limiter les pertes, un enfouissement est nécessaire, notamment avant les semis de maïs.La volatilisation d’ammoniac est le processus physico-chimique de passage du NH4+ adsorbé sur le complexe argilo-humique ou dissous dans la solution du sol vers sa forme gazeuse NH3 libérée dans l’atmosphère. Elle s’opère à la surface du sol à partir d’une source d’azote ammoniacal : engrais minéral ou produit organique. Les pertes d’azote par volatilisation ammoniacale limitent l’efficacité des apports d’azote. Plus l’azote de l’engrais (minéral ou organique) est présent sous forme d’urée ou d’azote ammoniacal (NH3), plus le risque de volatilisation est élevé. C’est le cas avec les solutions azotées, l’urée, les lisiers de porcs et de bovins, les fumiers et fientes de volailles.L’essentiel de la volatilisation se produit dans les heures qui suivent l’épandage. La volatilisation est plus importante par temps sec, chaud et venteux. La rapidité du phénomène implique d’enfouir très rapidement l’engrais de ferme après épandage. L’efficacité d’un enfouissement supérieur à 10 cm, juste après l’épandage du produit, permet de supprimer la quasi-totalité des pertes. L’enfouissement par le labour et les outils à disques est le plus efficace. Concernant la solution azotée, riche en urée et en azote ammoniacal, des expérimentations récentes ont permis de mesurer des pertes par volatilisation proches de 10 %. Même observation pour l’urée, compte tenu de sa composition (100 % sous forme uréique). Ces pertes peuvent devenir plus conséquentes en cas de temps sec, chaud et venteux. Il est donc recommandé d’apporter la solution azotée en période pluvieuse (petites pluies annoncées dans les 3 jours après l’apport). Dans ces conditions, l’efficacité de la solution azotée sera proche de celle de l’ammonitrate.

Attendre les bonnes conditions d’implantation pour les semis du maïs

Les sols sont actuellement en train de se réchauffer et se sont ressuyés au cours du mois de mars. Toutefois, les pluies récentes ont pu saturer à nouveau les sols en eau. La préparation du lit de semences et le semis doivent absolument se faire dans les meilleures conditions…- Attendre un ressuyage en profondeur (diagnostic à la bèche) et adapter le travail du sol à chaque parcelle. Limiter les phénomènes de compaction. Ne pas provoquer de lissage avec la multiplication des interventions. Limiter le nombre de passages.- Soigner la préparation du lit de semences : obtenir une terre ameublie en profondeur, rassise sans être trop tassée et affinée sans excès en surface. La transition entre le lit de semences et l’horizon délimité par les outils de reprise doit être progressive.- Soigner la mise en place du peuplement. Mettre la graine à une profondeur régulière, d’environ 4-5 cm. Objectif 100 000 plantes récolte en fourrage, 95 000 plantes récolte en grain. Protéger la graine si nécessaire. Et dans les situations les plus froides, appliquer une fumure starter.- Semer au bon moment ! Le maïs demande une levée rapide et homogène. En moyenne, en Normandie, un semis de début avril mettra 20 à 25 jours à lever, contre 12 à 15 jours seulement pour un semis de mi-avril. Au niveau de la floraison, une avance de 15 jours au semis se traduit par une floraison plus précoce de seulement 3 jours. Des essais récents réalisés par Arvalis - Institut du végétal ont permis de préciser les enjeux liés à la date de semis. En maïs fourrage, on enregistre en moyenne une légère baisse de rendement (- 3 %) sur les semis précoces de la première quinzaine d’avril, par rapport aux semis de la deuxième quinzaine d’avril, avec une plus grande variabilité interannuelle. La qualité des maïs fourrage est globalement identique sur les semis d’avril, mais elle chute sur les semis du mois de mai. En maïs grain, les résultats sont un peu différents. En moyenne les semis très précoces de début avril apportent un faible gain de rendement (de l’ordre de + 2 %) par rapport aux semis de la deuxième quinzaine d’avril, avec toutefois une plus grande variabilité interannuelle. Sur les semis de mai, les rendements observés en maïs grain décrochent plus (- 10 %) qu’en maïs fourrage. Ce comportement différent à la date de semis entre maïs fourrage et maïs grain s’explique par le fait que les surfaces foliaires et les gabarits de plantes sont plus courts en semis précoces. Ceci est dû aux conditions plus froides que rencontrent les cultures en semis précoces. La photosynthèse  est réduite et la production de biomasse plante entière est affectée. Cependant la production de grain profite malgré tout de l’allongement du cycle permis par les semis précoces.Concrètement, Il est inutile de démarrer trop tôt, mais il faut être prêt début avril en zone grain et mi-avril en zone fourrage. En zone traditionnelle de maïs grain, les semis pourront débuter vers le 5 avril en vallées de Seine et d’Eure, puis progressivement sur les plateaux… Dans les régions à forte dominante maïs fourrage, généralement plus fraiches, les semis débuteront vers le 10 avril dans les régions les plus favorables (Plateau d’Evreux, plateau du Neubourg, Vexin sud, Vallées de Seine et d’Eure, Plaine de Caen-Falaise), vers le 15 avril en Pays d’Ouche, Lieuvin, Pays de Bray et Vexin nord, Bessin, Sud Manche et régions voisines, vers le 20 avril dans les secteurs les plus froids en Pays de Caux, Pays d’Auge, Bocage normand du calvados et de l’Orne, Cotentin. Et ce si la météo le permet. On retiendra qu’il y a plus de risques que de bénéfices avant la mi-avril. En semis précoces, le risque de gel est n’est pas forcément le principal facteur limitant aujourd’hui. La survenue d’une période froide et humide juste après le semis est plus à craindre. Ces conditions difficiles entraînent une durée de levée très longue et exposent le maïs aux problèmes agronomiques (battance…) et aux attaques de ravageurs (mouches…) (graphique 1).

Lutte contre les ravageurs du sol : deux nouvelles spécialités commerciales

La protection des semis commence par une évaluation des risques ravageurs, et notamment du risque de taupins. Sont considérées à risque taupins, les parcelles anciennes prairies retournées depuis une ou plusieurs années, les parcelles où il a déjà été repéré une attaque de taupins, quel que soit l’espèce cultivée. Le risque de mouches des semis est lié à la présence de substances organiques fraîches en cours de décomposition (fumier frais, couvert fraîchement incorporé) ; un délai de deux mois entre apport/destruction et semis du maïs limite le risque de mouche des semis. Il n’est pas possible d’estimer le risque oscinies ou géomyzes.Pour les prochains semis, deux nouvelles spécialités à base de lambda-cyhalothrine (famille des pyréthrinoïdes) viennent compléter la panoplie des solutions microgranulés déjà sur le marché (Force 1,5G, Belem 0.8Mg, Fury Géo) : il s’agit des produits Karaté 0.4Gr et Trika Expert. Dans nos essais, ces deux spécialités ont la même efficacité que les autres microgranulés testés (graphique 2).Le produit Sonido appliqué en traitement de semences présente une efficacité correcte jusqu’au stade 5-6 feuilles du maïs, mais son niveau de protection décroit rapidement en cas d’attaque de taupins au-delà de ce stade de développement végétatif. En conditions difficiles après le semis, des défauts de sélectivité, légers retards à la levée voire pertes de plantes, ont parfois pu être observés. La performance des micro-granulés, Force 1.5G, Belem 0.8 MG et Fury Géo, est liée à la qualité de l’application.  Il n’y a pas lieu de modifier la date de semis pour essayer de réduire la pression de taupins ou de réduire la profondeur de semis pour améliorer l’efficacité des protections insecticides. Pour assurer une levée homogène, la profondeur de semis doit rester entre 4 et 5 cm, dans un lit de semences suffisamment fin, frais et bien rappuyé. A l’implantation, tout ce qui favorisera une croissance rapide des jeunes plants de maïs sera bénéfique : variété à bonne vigueur, engrais starter localisé au semis.

Présence de corvidés : des solutions à combiner dès les semis

Les corvidés consomment les graines de maïs dès le semis et jusqu’au stade 4-5 feuilles, voire exceptionnellement jusqu’au stade 7-8 feuilles. Les corvidés sont fortement présents dans les vallées avec des refuges à proximité (bois, grands arbres, nidification dans les parcs…). Ils n’apprécient pas d’être dérangés. Ainsi, les parcelles les plus à risque sont celles où la présence humaine est moindre (grandes parcelles, parcelles en hauteur avec vue dégagée, parcelles isolées). Par ailleurs, une zone avec seulement quelques parcelles de maïs est davantage exposée au risque corvidés qu’un secteur où les semis seraient simultanés sur de larges surfaces (dilution de l’offre). Dans la mesure du possible, il est préférable de ne pas semer les parcelles trop en décalé -c’est-à-dire trop précocement ou trop tardivement- par rapport à l’environnement proche. Le semis superficiel (2-3 cm) est une pratique à risque favorisant la préhension des graines : il est préférable de respecter une profondeur de semis de 4 à 5 cm. Un lit de semence trop motteux avec présence de nombreux résidus peut faciliter les déprédations de plantules par les corbeaux.Des systèmes d’effaroucheurs existent (épouvantails, canons…). Leur efficacité peut être décevante suite à une accoutumance souvent rapide des oiseaux. Un passage humain régulier reste souvent le plus efficace pour éviter une installation des corbeaux dans la parcelle. Dans les secteurs régulièrement affectés, les déclarations annuelles des dégâts peuvent permettre la mise en place d’un plan de régulation des populations. Le piégeage des oiseaux grâce à des cages permet de réduire leur présence et leurs préjudices. Notons que cette pratique nécessite d’obtenir l’agrément piégeur.Des traitements de semences sont disponibles sur le marché pour un usage répulsifs corbeaux. Ces spécialités chimiques autorisées appartiennent à la famille des carbamates. Elles ont fait l’objet d’expérimentations depuis plusieurs années (graphique 3). Si l’attaque est forte (avec seulement 20 % de plantes restant présentes dans les témoins non protégés), le produit Korit 420 FS (à base de zirame, avec un apport de 250 g de substance active/q) présente une efficacité légèrement supérieure à la référence Gustafson 42S / Royalflo (à base de thirame, 160 g SA/q). En cas de très fortes attaques, les solutions chimiques ne présentent pas une efficacité satisfaisante et évitent rarement de devoir procéder à un nouveau semis. Dans ces situations, seule la modification de l’itinéraire technique et la régulation des populations de freux et/ou corneilles dans l’environnement proche de la parcelle peuvent permettre de diminuer les risques pour la culture.Bon semis.

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