ZNT : contre la démagogie, une agriculture technique et scientifique
Lundi 23 septembre, des représentants des Jeunes agriculteurs, de la FRSEA de Normandie, de la MSA, de Coop de France Normandie et de la FR Cuma Normandie Ouest étaient réunis à la Chambre régionale d’agriculture au sujet des ZNT. Selon eux, la mise en place d’une distance entre les habitations et les zones de traitement n’est pas la solution. Ils misent sur les buses anti-dérive, les fenêtres météorologiques et les haies.
Nous sommes attachés à la protection de nos cultures et à gagner notre vie. Nous le faisons en respect de la réglementation, de plus en plus exigeante, qui est du ressort de l’État, sur avis de l’Anses (1). Les maires qui font du buzz sont souvent militants et n’écoutent pas les avis des agences de santé. » Arnold Puech d’Alissac, président de la FRSEA de Normandie, exprime son « désarroi » face à ce qu’il traduit par de « l’agriphobie, la peur de l’agriculture », une semaine après l’incendie criminel qui a ravagé les poulaillers d’un éleveur ornais. Lundi 23 septembre, entouré par des représentants des organisations agricoles, il aborde le sujet des zones de non-traitement.
150 m, ça ne suffit pas par force 5
Le décret et l’arrêté régissant l’usage des produits phytopharmaceutiques sont soumis à la consultation du public jusqu’au 1er octobre. « Nous invitons tous les agriculteurs et les habitants à y répondre », amorce Arnold Puech d’Alissac. Mais « nous ne devons pas être les jouets du populisme ni de la démagogie » lance-t-il en réponse aux maires qui prennent des arrêtés municipaux interdisant l’utilisation de produits phytosanitaires à moins de 150 m des habitations. Une distance qu’il juge, de toute façon, insuffisante si un agriculteur traite par vent de force 5 beauforts. « La distance de ZNT n’est pas une réponse au problème de dérive », de vent ni d’évaporation du produit.
Réflexion en amont
« Avant toute intervention, un travail est mené en amont, retrace Jean-Luc Duval, président de Coop de France Normandie. Soixante-dix stations météo installées en Normandie collectent des données d’humectation, de température, de vent, etc. Des modèles mathématiques envoient des informations aux agriculteurs, qui décident ensuite d’intervenir ou pas. Nous ne sommes pas des fêlés de l’intervention ni des heures de tracteur ! Nous appréhendons notre métier de façon scientifique et technique. » Le panel de données météorologiques incite souvent les agriculteurs à traiter tôt le matin ou tard le soir : « les moments les plus propices à l’absorption du produit par la plante sont ceux où le vent tombe et où les écarts de chaleur diminuent », précise Sébastien Windsor. En traitant en début et fin de journée, voire la nuit, « nous ne nous cachons pas ». « Il faut trouver le bon créneau », approuve Rodolphe Lormelet. Le président de la FR Cuma Normandie Ouest, aussi membre d’un GIEE de plaine, illustre ses propos en racontant qu’une intervention, dans de bonnes conditions, dans une parcelle ayant des ruches en bout de champ, ne provoque aucune mortalité chez les abeilles. Dans ce contexte de décisions selon la fenêtre météo, les élus désapprouvent l’idée d’un délai de prévenance des riverains. « On passerait notre temps à envoyer des SMS pour dire qu’on va traiter, puis annuler. Puis recommencer… », s’accordent-ils.
Droit dans le sol
Pierre La Baillif, président de JA Normandie, enchaîne : « il existe sur les pulvérisateurs des buses anti-dérive pour limiter voire supprimer le phénomène de dérive. Le but est que 100 % du produit aille sur la plante, que l’on soit au milieu du champ ou près des maisons ». « Nous ne sommes pas loin d’atteindre la totalité des pulvérisateurs qui en sont équipés », précise Anne-Marie Denis, vice-présidente de la FRSEA. « Nous sommes prêts à mettre en œuvre toutes les mesures intelligentes et qui se justifient », assure Arnold Puech d’Alissac. « Des chartes riverains sont en préparation où nous voulons mettre en avant les buses anti-dérive, les traitements de nuit et l’utilité des haies », poursuit le président de la FRSEA. Celles-ci seront signées sur la base du volontariat par les agriculteurs, les communes et les associations. « La difficulté, avec l’emballement médiatique du mois d’août, c’est que les présidents d’associations et les maires ont peur. » Tous gardent en tête l’arrivée des élections municipales, dans les six prochains mois.
(1) Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.