Betteraves
Betteraves - Sucre : Cagny a de l'appétit pour 2017
Le monde betteravier doit s'y préparer. La fin des quotas est annoncée. Le groupe Saint-Louis Sucre, dont dépend l'usine de Cagny, a organisé plusieurs rencontres avec ses planteurs. Ces « shows » sont bien rodés. L'image donnée est résolument positive. Car il faudra produire plus.

"La situation était confortable. On se battait pour la crème sur le gâteau, il faudra se battre pour le gâteau", a déclaré Francis Barba, le directeur commercial de Saint-Louis Sucre. Son groupe souhaite entraîner les planteurs dans cette dynamique. Au centre des congrès de Caen, l'industriel voulait donner une image résolument positive. Pendant deux heures de dissertation sur la période post 2017, le slogan "la betterave, on y croit" s'affichait sur la tribune. C'est d'ailleurs l'essentiel du message que les planteurs devront retenir. Pour l'instant...
Une libéralisation à relativiser
Si la future règle du jeu est connue, son application concrète est loin d'être réglée. Les négociations avec les représentants des agriculteurs débutent seulement. Actuellement, l'usine de Cagny comme l'ensemble des industriels respectent un quota fixé par Bruxelles. Les exportations sont limitées et les planteurs bénéficient d'un prix minimum garanti. Cependant, 2017 signifie : fin du quota, fin du prix minimum et fin des restrictions à l'exportation. Cette libéralisation est nuancée par Patrick Dechaufour. "Le marché européen reste sécurisé. Les droits de douane sont maintenus jusqu'en 2020", précise le président du syndicat betteravier Calvados, Sarthe et Orne. Restent les pays moins avancés qui ne paient pas pour importer en Europe. S'y ajoutent aussi les accords bilatéraux et les accords préférentiels qui sortent du cadre des accords de l'organisation mondiale du commerce. "Attention à la multiplication de ces accords préférentiels ! 150 000 tonnes de sucres, c'est une usine comme Cagny", prévient Patrick Dechaufour.
Se préparer à la compétition et produire plus à Cagny
Saint-Louis Sucre aura la possibilité de produire plus et d'exporter davantage. Le groupe entend bien saisir cette opportunité. Et la concurrence pourrait notamment être européenne. "Nous devrons donc avoir le meilleur coût. Il s'agira d'une performance de filière", indique Franck Barba. Le sucre devrait subir la comparaison avec l'isoglucose, un sirop issu du maïs et utilisé par les industriels de l'agroalimentaire. Mais, le sucre jouit d'une meilleure image. Et le gâteau mondial semble appétissant. Selon Saint-Louis Sucre, la consommation mondiale de sucre risque d'exploser. La demande passerait de 100 millions de tonnes à 269 millions d'ici une quinzaine d'années. "Auparavant, l'export était considéré comme une voie de dégagement du marché européen. Désormais, le marché export demande de la qualité", souligne Thierry Desesquelles, directeur betteravier de Saint-Louis Sucre.
2500 à 3000 hectares de plus ?
Ce bouleversement mondial provoquera un impact local. À commencer par la durée de campagne de la sucrerie de Cagny... En 2017, la période devrait passer d'un peu plus de 100 jours actuellement, à 120 jours. 12 500 hectares sont aujourd'hui contractualisés. Les responsables veulent 3000 ha, sur le site de Cagny, pour atteindre leur objectif de durée de campagne. Soit une production qui passera 1 à 1,2 million de tonnes sur l'usine calvadosienne. "Nous gagnons 1,5 % à 2 % de rendement par an. Avec le travail générique mené, l'objectif est d'avoisiner les 4 % d'augmentation par an. Dans ces conditions, 2500 hectares suffisent déjà, cela représente 200 000 tonnes", estime néanmoins le syndicat betteravier.
Pas de nouveaux planteurs avant 2017
Autour de Cagny, Saint-Louis Sucre compte environ 1075 planteurs sous contrat. Ils sont répartis sur l'Eure, le Calvados et l'Orne. Pour fournir ses usines, de nouveaux agriculteurs pourraient contractualiser avec l'industriel. Ce dernier fera alors appel à la commission mixte, composée de planteurs et de représentants des entreprises. "Il y aura un peu plus de surface et peut-être un peu plus de planteurs, mais pas avant 2017. Et la priorité sera donnée aux planteurs existants. À ce jour, il semble impossible de définir dans quelles proportions. Nous devons par exemple sonder les planteurs actuels pour connaître leurs possibilités, d'un point de vue agronomique", rappelle Patrick Dechaufour.
Des contours à définir
Saint-Louis Sucre a affiché sa volonté : négocier collectivement. Prix, modalité du futur contrat, volume supplémentaire par planteur, de nombreuses zones d'ombres persistent. Certains planteurs, présents à la réunion, restent peut-être sur leur faim. Saint-Louis sucre a cependant transmis son message. La betterave, ils y croient.
Une réaction positive du syndicat betteravier
Le syndicat betteravier Calvados-Orne-Sarthe est prêt à collaborer avec l'industriel. "La note est positive. Nous ne sommes pas là pour polémiquer. L'objectif était de donner envie de produire des betteraves, même s'il est difficile d'évoquer des détails contractuels. Les négociations débutent seulement. Nous sommes dans un bon état d'esprit. Saint-Louis sucre veut négocier collectivement et non pas individuellement : ça nous va. Nous sommes prêts à relever le challenge de la compétitivité. Il faudra concrétiser cette bonne tonalité. Une concurrence existe entre les cultures. Cagny a donc intérêt à respecter les contrats et les planteurs afin d'assurer son approvisionnement. Nous sommes prêtes à accompagner les périodes de vaches maigres si les contrats et la fixation des prix sont transparents", avance Patrick Dechaufour.