Daniel Génissel : “les blocages sont suspendus, l’action continue”
La tension semble retombée après la suspension du blocage des abattoirs décidée par la FNB. Retour sur les acquis de cette forte mobilisation au niveau national avec Daniel Génissel, président de la section viande bovine de la FRSEA de Basse-Normandie.

Après trois jours de barrage, vous avez finalement décidé de lever le mouvement mercredi soir, à l’issue de la table-ronde. Pourquoi ?
D’abord, nous avons décidé de suspendre les blocages, non de les lever. La nuance est importante car elle signifie que nous demeurons mobilisés et prêts à reprendre le mouvement si nécessaire.
Cela veut-il dire que vous n’avez pas confiance dans l’application des conclusions de la table-ronde ?
Les engagements pris à Paris sont fragiles, en effet. Leur bonne application dépend de la bonne volonté de l’ensemble des acteurs de la filière. Ils se sont tous engagés à faire en sorte qu’une hausse continue des cours de la viande démarre enfin. Nous avons besoin de vérifier le respect des engagements des uns et des autres. Nous le vérifierons et c’est dans ce sens que de nouveaux blocages ne sont pas exclus dès lors que certains ne respecteraient pas leur parole.
Comment jugez-vous ces engagements pris mercredi dernier ?
C’est un premier pas. Encore une fois, c’est dans l’application que nous verrons si la discussion a été fructueuse. Si tel est le cas, alors on peut espérer une hausse des cours dont les producteurs ont un besoin urgent.
Justement, il va falloir attendre pour couvrir le coût de production…
L’essentiel à nos yeux, c’est que le mouvement s’engage et que l’on sorte de la spirale à la baisse dans laquelle nous étions. Vérifions déjà l’application des hausses annoncées et leur pérennité dans le temps. Quant à couvrir les coûts de production, il s’agit bien d’un ordre de grandeur qui a été donné. Chacun calcule son coût de production et il n’est pas égal sur toutes les exploitations. C’est donc à manier avec précaution.
Peut-on espérer une transparence des transactions ?
Oui on peut espérer une meilleure transparence, notamment via une remise à plat du système des cotations. Grâce aussi à un raccourcissement du délai de mise à disposition des informations d’abattage. C’est important car cela donne à l’éleveur la possibilité de demander un réexamen du classement de sa bête. Par ailleurs l’interprofession est mandatée pour créer un indicateur de la valeur du steak haché, lequel représente l’essentiel du débouché de la viande fraîche. On peut en attendre une comparaison entre la valorisation du steak haché et les prix de vente des bovins. Enfin, les distributeurs sont sommés d’apposer l’indication de l’origine des viandes mises en rayon avec le logo Viande de France et les promotions devraient être encadrées.
D’autres points ?
Oui, le ministère va créer une plate-forme visant à favoriser les réponses aux appels d’offres à l’export. C’est positif à condition, là encore, que les entreprises jouent collectif à l’export. Enfin, l’enveloppe de prise en charge des cotisations sociales des éleveurs de bovins est doublée. Elle atteint 7 millions d’euros et c’est aux éleveurs de jouer, cette fois, en demandant dès maintenant à la MSA de prendre en charge une partie de leurs cotisations sociales.
Un dernier mot sur ces actions ?
Ce blocage d’abattoirs a été provoqué par l’exaspération des éleveurs. Il a permis de faire reconnaitre la situation insoutenable des producteurs et de faire engager distributeurs, abatteurs et l’ensemble des maillons de la filière à relever les prix payés aux éleveurs. Je veux adresser un grand merci aux éleveurs qui se sont mobilisés dans des délais très courts. La saison n’est guère favorable, l’action n’est pas très plaisante mais il était nécessaire que nous y participions. Et un grand merci à la FDSEA du Calvados pour l’organisation sur place et les conditions matérielles.