DEPHY ECOPHYTO : le lycée agricole de Vire montre l’exemple
Créés entre 2010 et 2012, les réseaux DEPHY ECOPHYTO commencent à faire apparaitre des trajectoires de changements intéressantes et transposables en faveur de la réduction des produits phytosanitaires. Focus sur la ferme du lycée agricole de Vire.

A droite : méteil à base de triticale et pois fourrager.


Directeur d’exploitation sur la ferme du lycée, Jean-Paul Rousière s’est donné comme objectif de faire reconnaitre l’exploitation comme une vitrine pour les étudiants comme pour les agriculteurs, en misant sur l’autonomie alimentaire et la réduction des phytos.
Quels changements sur l’exploitation depuis l’entrée dans le réseau DEPHY ECOPHYTO ?
Cette ferme est représentative des exploitations en production laitière du Bocage Virois. Le système initial était constitué d’une rotation de plusieurs années d’ensilage de maïs ensilage suivi de blé tendre d’hiver, destinés à l’alimentation des animaux et à la vente pour une partie du blé.Il y a eu de nombreux changements en terme d’assolement et donc de rotation. Les hectares de blé consacrés à la vente ont été remplacés par de nouvelles cultures fourragères comme le méteil et le trèfle violet qui ont permis une diminution significative des herbicides. Le lupin est venu enrichir la diversité du système tout en fournissant à la ferme plus d’autonomie sur la production de concentré fermier.En complément de ces grands changements, la conduite des cultures déjà présentes a été optimisée :- sur le maïs, la consommation d’herbicides a diminué grâce à la rotation et à un meilleur positionnement du traitement, dorénavant effectué en post-levée.- sur le blé, une vraie conduite rustique a été mise en place avec un choix de variétés résistantes, l’arrêt du régulateur et le passage d’un seul fongicide.Ces modifications de pratiques ont permis une réduction significative de l’indice de fréquence de traitement à l’échelle du système de culture de 38%, portant l’IFT 2014 à 1.24.
Pourquoi avoir modifié les pratiques de la ferme ?
Initialement, nous souhaitions travailler sur le système fourrager pour gagner en autonomie, et la réduction de l’utilisation de produits phytosanitaires allait de pair. Nous avons aussi cherché à optimiser l’usage de notre désileuse automotrice qui nous a permis de diversifier les fourrages. C’est pourquoi dès 2011, nous avons commencé à faire du méteil. L’année fut bonne et les conditions de récolte étaient favorables. Nous avons donc poursuivi dans cette voie.L’implantation de trèfle violet sous couvert nous est apparue également comme une source de protéines intéressante pour la ferme. ».
Quelles sont les conséquences sur le travail et les résultats économiques ?
Peut-être plus qu’ailleurs, la contrainte salariale d’une ferme de lycée agricole est importante. Nous ne pouvons pas nous démultiplier dans trop de chantiers ni nous astreindre à des travaux tous les week-ends. C’est pourquoi nous privilégions les fourrages à récolter en une seule coupe comme le méteil et que nous n’avons pas mis en œuvre du binage sur le maïs.Côté économique, les charges du poste phytosanitaire ont diminué et le produit brut est identique, ce qui permet une légère augmentation de la marge brute.
Si c’était à refaire ?
Le système n’est pas encore abouti, nous sommes encore dans l’ajustement. Nous ne sommes pas des pionniers. Nous nous inspirons sans cesse des agriculteurs qui nous entourent. En tant que ferme de lycée, nous voulons montrer aux élèves des pratiques différentes de celles de leurs parents, et je pense que nous y parvenons avec ce système.
L’introduction du lupin dans l’exploitation
Le lupin permet d’améliorer l’autonomie en matière azotée en introduisant dans la rotation une culture qui restitue de l’azote au système. Les types variétaux d’hiver ou de printemps permettent de créer des alternances de cycle culture d’hiver/ culture de printemps intéressantes dans la lutte contre les adventices. La première année, cette nouvelle culture sur l’exploitation a suscité quelques inquiétudes chez les salariés de la ferme qui ont cherché à sécuriser le rendement par 3 désherbages chimiques. Mais dès l’année suivante, l’observation au champ et les conseils de techniciens ont permis une prise de confiance et finalement une conduite phytosanitaire plus économe.