Gilles Bourg peint du coq ancien à la vache moderne
Originaire de Moyaux (14), Gilles Bourg dépeint la campagne d’antan, et surtout la vache normande, son premier modèle. Rencontre avec l’artiste aujourd’hui installé à Caen.

Gilles Bourg se présente comme « un homme sérieux ». Il devait l'être dans son métier de banquier. Il l'a été encore dans sa première vie de peintre qui débute à 40 ans grâce à l'ouverture d’une boite de peinture laissée dans un coin par son fils et qu'il « n'a depuis, jamais refermée ».
Pourtant, le petit homme de 76 ans a l'œil rieur derrière ses lunettes. Et surtout, il est passionné. Par ses œuvres. Par la peinture. Avant notre visite, il a préparé ses classeurs recensant ses « quantités » de productions. Des pages de photos de tableaux collées avec soin au milieu des articles de journaux qui lui sont consacrés. Ici, ses premières œuvres à partir de 1983, peintures de poule, de cheval ou de vache sur les portes d'armoire ou de meuble. Là, la ville de Caen, qu'il dépeint depuis 15 ans et qui l’inspire toujours. Ensuite, des vaches, exclusivement.
Au fil des pages, les ruminants sont au pied d'une maison en colombage, près d'une vieille charrue ou d'un pressoir. « Je représente la Normandie, comme les gens l'imaginent », celle de l’ancien temps. Représentées sur du bois de tonneaux à cidre (parfois vieux de 150 ans), les bêtes ont une saveur d'antan. « Je peins l'époque que j'ai connue en allant de ferme en ferme avec mon père qui était bourrelier. C'est ce temps-là qui m'intéresse parce que je suis peut-être le dernier témoin de cette époque. L'agriculture est en train de changer, le monde également... Je crains cette évolution, et de ne plus voir aucune vache dans les prés. J’essaie de prôner un certain retour aux sources, une vie simple. Ces vieux repères rassurent.» D’où un surnom, « le peintre du bon vieux temps ». La technique utilisée pour fixer l'œuvre sur « du cœur de chêne exclusivement » date, elle aussi, du XIIIe siècle. « Il faut démonter le tonneau, le poncer puis utiliser six couches de peinture. Une fois fini, c'est éternel ! ».
Besoin de changement
Et puis, feuilletant la fin de l’album, il y a le changement, « mes vaches new style » comme il les appelle.
Celles qu'il réalise depuis six mois. Colorées, modernes, influencées par des peintres tels que Fernand Léger ou Andy Warhol, et dessinées sur toile. « Je suis trop vieux pour continuer à peindre sur du bois de tonneaux. C'est lourd et cela représente un travail colossal. J’avais besoin de faire autre chose ». Changer mais pas de thème ! « Les gens aiment les vaches et moi, maintenant je les adore ! Elles m'ont tant apporté ! » La conversion fût soudaine. « Ma fille qui peint également mais de l'abstrait, m'a demandé de dessiner une de mes vaches au milieu d'une toile qu'elle complèterait. Elle ne l'a jamais faite, alors, au bout de deux mois, je m'y suis attelé. J’ai dessiné un animal très coloré. Puis un autre, et un dans le ciel au milieu de traits bleus...Et l’œuvre a reçu le prix de la ville de Caen l'an dernier. »
Un déclic pour le peintre. Désormais, les vaches de Monsieur Bourg sont gracieuses, féminines, hautes en couleur. Elles se déshabillent en rêvant de Crazy Horse, elles revêtent le costume trois pièces pour le 14 juillet, et dressent souvent un mot d'humour, qui fait toujours rire l'auteur.
L'homme sérieux aurait-il envie de s'amuser ?
Les vaches s’exposent
Comme chaque année, depuis 20 ans, Gilles Bourg exposera une quarantaine d’œuvres à Vimoutiers (61) lors de la fête de la pomme les samedi 14 et dimanche 15 octobre. « J’ai toujours présenté les vaches traditionnelles sur le bois de tonneaux. Avec mes vaches colorées, le public qui me suit habituellement sera surpris. J’ai hâte de voir leur réaction » glisse le peintre. Les œuvres retrouveront ensuite leur Calvados natal pour être exposées le dimanche 22 octobre à Beuvron-en-Auge (14), là encore, lors de la fête de la pomme. « J’aime être exposé au milieu de fêtes traditionnelles, rencontrer mon public et essayer de créer une relation, partager un souvenir de campagne ! »