Intervention : une question de prix
La FDSEA 50 et la FNPL ont organisé les premières rencontres laitières européennes au Mont-Saint-Michel. Membres des syndicats agricoles européens et représentants de la transformation de la commission européenne ont confronté des volontés divergentes. Ils partagent cependant le constat d'une filière laitière en crise.
Les premières rencontres laitières européennes ont choisi le cadre du Mont-Saint-Michel. Ce symbole national dépasse les frontières hexagonales. "Pendant près de 1 000 ans, des hommes et des femmes sont venus par ces routes, appelées "chemin de paradis", chercher l'assurance de l'éternité", note Thierry Roquefeuil, président de la FNPL.
Une crise partagée
Plus modestement, les acteurs de la filière européenne ont confronté leurs visions et échangé voire proposé.
Premier constat sur la crise actuelle : les problématiques sont partagées par l'ensemble des producteurs européens. Tous subissent l'embargo russe, la volatilité des prix et la hausse des coûts de production. Voilà de quoi rassurer les producteurs français qui se sentiront moins seuls sur l'échiquier des revendications. Reste à trouver une réponse commune. "Regarder ce qui se passe sur les marchés ne donne pas une politique. La commission européenne dispose d'un baromètre mais ne cela ne fait pas une politique européenne", estime Thierry Roquefeuil. Brigitte Misonne fonctionnaire de la Commission européenne rappelle néanmoins que "les 500 millions d'euros montrent que la commission a compris la situation. Mais le problème reste un déséquilibre entre l'offre et la demande".
Haro sur la gestion
des volumes
Les représentants des éleveurs européens semblent rejeter
l'idée d'une gestion des volumes. Pour Heinz Korte, membre du groupe lait du COPA-COGECA, "les producteurs allemands ne comprennent pas qu'on parle de gestion des volumes. Si on se limite, nous allons perdre les nouveaux marchés. Chez nous, les transformateurs prennent tous les volumes sans garantie de prix". En France, les transformateurs tendent plutôt à limiter les volumes et à garantir les cours. Alexander Anton, représentant des industriels laitiers se montre plus incisif : "les quotas ont empêché la conquête de nouveaux marchés. Gérer les volumes en France ou même en Europe est inutile. D'autres produiront plus".
La solution de l'intervention
Dans ce contexte, l'intervention semble faire son chemin. "On peut gérer l'offre avec le stockage, l'intervention et le soutien à l'export", avance Tommasso Mario Abrate, vice-président du groupe lait COPA-COGECA et producteur en Italie. Pas si simple... Définir le bon niveau du prix nécessite un débat. Mansel Raymond, président du groupe lait COPA-COGECA et producteur de lait au Royaume-Uni est favorable au relèvement du prix d'intervention car "les coûts de production sont à la hausse". Son homologue allemand se montre prudent sur le sujet : "si on l'augmente, il faudra plus de temps avant d'écouler la marchandise. Il y a débat sur le bon montant". Les premières rencontres laitières européennes peuvent donc avoir une suite.
Sébastien Amand, président de la FDSEA 50
"Nous nous sommes posés avec nos premiers concurrents européens. Ils font les mêmes constats que nous. Ils touchent du doigt la conséquence des choix qu'ils ont eux-mêmes poussés. Je pense à la suppression des outils de régulation dont nous disposions. Je veux être optimiste. Les prochaines rencontres du COPA lait pourront peut-être aboutir sur des positions communes. Je plaide pour la remise en place d'outils de régulation. Je pense d'abord à l'intervention.
Nous avons aussi constaté que nos voisins restent à la conquête des marchés mondiaux. Ils sont dans une démarche libérale qui nous obligera à revoir le positionnement des producteurs dans la filière laitière française. Nous ne pourrons pas faire indéfiniment l'autruche par rapport à nos principaux concurrents".
Ludovic Blin, responsable de la section lait de la FDSEA 50
"Tous les pays présents partagent les mêmes problématiques : volatilité des prix, hausse des coûts de production ou pression réglementaire. Je note des avancées sur la chaine alimentaire. Contractualiser du producteur jusqu'à la distribution est évoqué. C'est important. Contractualiser avec le distributeur pourrait atténuer la volatilité. Les producteurs européens semblent en avoir conscience.
J'ai aussi constaté que les pays d'Europe du Nord sont nettement plus agressifs sur la conquête de nouveaux marchés. J'espère que nous pourrons aussi demain travailler avec nos transformateurs".