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La lipolyse, un paramètre de qualité qui mérite d’être analysé !
Utilisée dans certaines régions comme un critère de paiement du lait, la lipolyse figure sur vos tickets depuis 2012 ; cet indice traduit une dégradation de la matière grasse, et peut varier en fonction des animaux, de l’alimentation, et des conditions de récolte et de conservation du lait.


Qu’est-ce que la lipolyse ? Les matières grasses du lait sont essentiellement des triglycérides regroupés dans des gouttelettes entourées d’une membrane : les globules gras.La lipolyse est le phénomène de dégradation des globules gras du lait par des enzymes appelées lipases. Elle conduit à l’augmentation de la teneur en acides gras libres dans le lait ce qui peut affecter le goût des produits laitiers (goût de rance, de savon, amertume), et en particulier les produits à haute teneur en matière grasse.
Mesure de la lipolyse
L’indice de lipolyse traduit le degré d’altération de la matière grasse ; sa mesure consiste à doser les acides gras libres.L’indice de lipolyse naturel du lait de vache se situe entre 0,2 et 0,4 milliéquivalents pour 100 grammes de matière grasse (meq/100 g de MG). Les méthodes d’analyse actuelles sont homologuées sur une échelle de 0,4 à 1,20 meq/100 g de MG.La lipolyse est prise en compte dans les grilles de paiement de 5 Centres régionaux interprofessionnels de l'économie laitière (CRIEL) ; au-delà du seuil de pénalité de 0,89 meq/100 g de MG les résultats d’analyse entrainent une pénalité sur la paie du lait de - 3,049 €/1 000 l.
Les origines de la lipolyse
La dégradation des globules gras du lait se fait par des enzymes (lipases) présentes soit naturellement dans le lait ou d’origine microbienne. Mais des facteurs thermiques ou mécaniques peuvent fragiliser les membranes des globules gras, les rendant plus facilement destructibles par ces enzymes.On définit 3 types de lipolyse : spontanée, microbienne et induite.- La lipolyse “spontanée” : elle est due à la lipase naturellement sécrétée dans le lait. Ce phénomène est variable selon les animaux, leur stade de lactation, de gestation (probablement lié à l’état hormonal des animaux) et leur niveau de production (les taux de lipolyse sont plus élevés chez les faibles productrices - moins de 10 kg/jour) ; la sensibilité du lait à la lipolyse augmente progressivement à partir du 3e mois de lactation, puis fortement au 8e mois (2 à 3 mois avant le tarissement). En cas de non tarissement, la lipolyse augmente dans les toutes dernières semaines de lactation/gestation, sans doute par sécrétion d’une lipase anormale.L’âge aurait une influence : le lait des jeunes vaches (primipares et deuxième lactation) est plus susceptible à la lipolyse spontanée que celui des autres animaux.L’alimentation a aussi une incidence : des niveaux très élevés de lipolyse (de l’ordre de 3 meq/100 g MG) ont été mesurés chez des vaches recevant en fin de lactation des ensilages d’herbe de mauvaise qualité et une restriction excessive des concentrés. L’ensilage d’herbe, même de bonne qualité, a tendance à entraîner des taux de lipolyse supérieurs à ceux observés avec l’ensilage de maïs ou le foin. Un stress alimentaire en fin de lactation peut donc favoriser l’augmentation de la lipolyse du lait.La réduction de l’intervalle séparant deux traites accentue la sensibilité du lait à la lipolyse, car en dessous de 8 h, la membrane qui entoure les triglycérides n’a pas le temps de se former suffisamment, rendant les globules gras plus sujets à la lipolyse ; un minimum de 9 h d’intervalle est recommandé.
- La lipolyse microbienne : elle est liée aux lipases sécrétées par certaines bactéries capables de se développer dans le lait à basse température (comme Pseudomonas par exemple) ; la présence de ces germes est liée à une contamination du lait au cours de la traite ou lors du stockage du lait. Les lipases microbiennes peuvent résister aux traitements thermiques subis par le lait lors de sa transformation. Il est donc impératif d’avoir une bonne hygiène de traite et de stockage du lait, et un bon nettoyage de l’installation et du tank pour limiter la présence de ces lipases dans le lait.
- La lipolyse induite : les chocs mécaniques et thermiques que subit le lait pendant sa récolte et sa conservation entraînent la déstructuration de la membrane qui entoure des globules gras ; cette fragilisation facilite alors l’action des lipases naturellement présentes ; parce qu’elle est favorisée par les chocs, cette lipolyse est dite induite.Tout phénomène qui contribue à chahuter le lait lors de son acheminement vers le tank est propice à fragiliser la membrane des globules gras (écoulement du lait turbulent, des entrées d’air venant de l’extérieur de l’installation de traite). Le matériel de traite peut donc avoir une incidence sur la lipolyse.
Les facteurs qui favorisent la lipolyse à la traite
Parmi les facteurs associés à un écoulement turbulent du lait, citons :- des longueurs de tuyaux trop importantes ;- la présence de coudes, de contre-pentes dans le lactoduc, la hauteur du lactoduc, une chute de lait trop brusque à l’entrée de la chambre de réception (limiter les hauteurs de chute de lait et les sections verticales, …) ;- une sous-alimentation ou un dysfonctionnement de la pompe à lait (désamorçage, clapet-anti-retour défectueux, déclenchement intempestif lié à la mousse, etc), …Les entrées d’air sont considérées comme étant un facteur important de lipolyse :- le type d’admission d’air des faisceaux trayeurs ;- les fuites anormales (ex : joints sur la griffe, clapets fuyants, fuite sur les raccords) ;- la technique de traite (entrées d’air intempestives lors de la pose des gobelets ou en fin de traite, glissement des manchons) ;- et l’état des manchons sont autant de facteurs de risque de lipolyse … D’où l’importance de soumettre son installation de traite à un contrôle Optitraite®.
Les facteurs qui favorisent la lipolyse au niveau du tank
La réfrigération du lait a également un impact sur la lipolyse ; les facteurs sont d’ordre :- mécaniques : une fréquence d’agitation excessive du lait (exemple : quand le lait ne recouvre pas les pales de l’agitateur), un déversement trop brutal du lait dans le tank, un mauvais réglage de la temporisation d’agitation ou de la hauteur de l’agitateur ;- et thermiques : le temps de réfrigération (trop lent ou insuffisant), une élévation trop importante de la température lors du stockage du lait, une température trop basse de conservation avec risque de gel, et des variations de températures dans le tank sont à prendre en compte.On cherchera donc une réfrigération rapide mais qui respecte le lait. Pour rappel, un tank qui fonctionne bien doit réfrigérer le lait en-dessous de 4° C en moins de 2 h après la fin de la traite ; l’élévation de la température entre deux traites ne doit pas dépasser 6 à 10° C. Le lait ne doit pas séjourner dans le tank à une température inférieure à 2° C (sinon, la cristallisation des triglycérides déstabilise la membrane du globule gras).En été, la lipolyse a tendance à être plus élevée car le lait nécessite un refroidissement plus important (les températures estivales nécessitent une agitation supérieure dans le tank) ; les élevages dont les résultats sont supérieurs à 0,64 meq/100 g MG au cours des autres trimestres sont les plus exposés à cette dégradation estivale.