Légumes : le Cotentin en ébullition
Lessay, La Haye-du-Puits, Valognes, Cherbourg ont vu arriver, tôt samedi matin, 70 tracteurs et remorques qui ont déversé 200 tonnes de déchets devant Intermarché et Leclerc.

"Pourquoi ces deux enseignes ? Tout simplement parce qu'elles ne se sont pas déplacées pour assister à la table ronde manchoise, organisée récemment à la préfecture". Jean-Luc Leblond, président de la section légumes FDSEA, donne le ton samedi devant l'Intermarché de Valognes. "Ras-le-bol d'être pris pour l'éternelle variable d'ajustement de la filière. On ne le dira jamais assez, nos prix de vente ne couvrent pas, loin de là, nos prix de production".
Route de la colère
Il y avait donc la route des plages dans le département ; samedi c'était surtout la route de la colère légumière. Les maraîchers de Créances prenaient d'assaut la
voie menant à l'Intermarché de
Lessay, laissant quelques tonnes de légumes pour barrer le passage. Une heure plus tard, l'enseigne de la Haye-du-Puits était bloquée, au carrefour, par une douzaine de tracteurs déversant tour à tour leur chargement de légumes avariés sous la surveillance de la gendarmerie. Du côté de Cherbourg et Tourlaville, c'était la grosse artillerie venue du Val-de-Saire qui protestait à son tour contre l'indifférence de Intermarché et Leclerc.
A Valognes, où se déroulait le point-presse, l'Intermarché flambant neuf n'a pas fait chauffer ses caisses enregistreuses. Face à la détermination des légumiers, les responsables de la grande surface ont préféré baisser le rideau. Dans le même temps, une rumeur se répandait, les deux enseignes en question n'auraient pas été invitées à la table ronde saint-loise. La FDSEA démentait aussitôt ces propos ; d'ailleurs dans la soirée, la préfecture envoyait un message indiquant "toutes les enseignes de la grande distribution présentes en Basse-Normandie étaient conviées lors de la table ronde organisée avec les producteurs légumiers le 10 octobre dernier". Sébastien Amand, président de la FDSEA, accompagné de Jean-Michel Hamel, secrétaire général, ne cachait pas sa colère, "il est clair que des pièges ont été tendus par la grande distribution ce samedi pour vous identifier sur l'espace privé des magasins, conduisant à des plaintes ; vous n'êtes pas
tombés dedans". Reste que toutes les enseignes n'ont pas le même comportement. "Carrefour notamment semble prendre conscience d'une crise réelle. L'AOP Jardins de Normandie de son côté a rencontré Auchan ; quoi qu'il en soit, on ne pourra faire évoluer le dossier de la crise légumière sans l'ensemble des GMS".
Le mot de la fin pour Jean-Luc Leblond, visiblement écoeuré par cette crise, non pas de production, mais de prix. " J'espère que les entrevues avec la grande distribution porteront leurs fruits. Si ce n'est pas le cas, cela voudra dire que cette même grande distribution peut imposer sa loi au gouvernement et donc diriger l'économie française".