François Dufour, vice-président du Conseil régional
Organiser avant l’été des “assises de l’urgence agricole”
Rencontre avec François Dufour, en charge de l'Agriculture au Conseil régional de Basse-Normandie.

Vous êtes passés de l’engagement syndical à l’engagement politique Pourquoi ?
Il me semble qu’il y a eu de nombreux précédents non ? François Guillaume, Christian Jacob… En ce qui me concerne, ce n’est qu’un prolongement logique de mon engagement personnel depuis 30 ans. J’ai le sentiment que c’est un acte courageux face à l’urgence que je vois venir depuis de nombreuses années. J’ai souvent dit qu’on allait dans le mur et nous y sommes. La seule chose qui compte c’est de continuer à se battre pour tous ceux qui sont en souffrance. Peu importe la manière de s’engager si l’engagement est sincère.
Quelle sera votre façon de travailler ?
J’ai toujours été dans la discussion avec l’ensemble des partenaires du monde agricole. Je serai, comme par le passé, à l’écoute de tous dans le respect du pluralisme et de la diversité.
A droite comme à gauche, la crise laitière s’est invitée dans les élections régionales. Quel est votre plan d’action sur le dossier lait mais aussi sur les autres productions agricoles?
La Région ne peut pas intervenir directement sur le prix du lait. C’est important de l’affirmer et de le réaffirmer. Les moyens agricoles de la Région sont limités sur le plan budgétaire (14 Me + 6 Me pour les lycées agricoles). La question du prix des productions (lait, viandes, céréales, légumes…) nécessite une approche globale.
Une approche européenne concertée avec l’ensemble des pays producteurs – le président de la République et le ministre Lemaire s’y sont engagés non ? Une maitrise des volumes de production. A cet égard la hausse de 2% des quotas est une décision européenne contestable et le gouvernement français l’a validée comme tous les autres Etats membres de l’Union. La Région Basse-Normandie demande la suspension immédiate de cette mesure.
Une approche interrégionale avec les autres régions productrices (Haute-Normandie, Pays de la Loire, Bretagne…). Nous allons coordonner nos actions de soutien à l’agriculture et organiser avant l’été des “assises de l’urgence agricole”. Nous allons aussi demander une rencontre en urgence avec le nouveau commissaire européen.
Les Régions peuvent intervenir en lien avec les autres collectivités locales dans d’autres domaines que les prix : la réduction des charges (CUMA, groupement d’employeurs, etc), le foncier, la formation, l’agriculture périurbaine.
Il faut en premier lieu remettre l’agronomie au cœur du métier de paysan et il faut donner aux Régions les moyens financiers de leur ambition. La décentralisation doit être poussée plus avant et nous allons continuer à nous battre pour obtenir une régionalisation des aides de la PAC. Il en va de l’avenir de nos territoires. Les signes donnés par le Président de la République très récemment sont inquiétants. En remettant en cause les avancées du Grenelle de l’environnement, en contestant un autre mode de redistribution il nous entraine à moyen terme vers une renationalisation de la PAC qui signera l’arrêt de mort de nombreux paysans. Les paysans ont besoin de confiance dans l’avenir, pour cela ils ont besoin de perspectives et de prix rémunérateurs.
Le développement de l’agriculture biologique est un axe majeur de la politique régionale depuis plusieurs années. La plupart des exploitations agricoles des lycées dont vous avez la responsabilité sont d’ailleurs en conversion. Est-ce un bon choix en termes de formation et de préparation des agriculteurs de demain à la diversité des marchés ?
Oui le développement de l’agriculture bio est important. En cela nous sommes en conformité avec les objectifs fixés par le “Grenelle” depuis 2007.
Actuellement 15 à 20 % du budget agricole de la Région est orienté vers le bio. Ce n’est pas 90% comme voudrait le faire croire certain. En ce qui concerne les exploitations des lycées agricoles, seule celle du lycée agricole de Coutances est en reconversion. Les crises que nous traversons nous enseignent que l’ensemble des “agricultures” doit s’appuyer sur de nouvelles démarches en matière d’agronomie. Les jeunes en formation dans nos lycées doivent avoir accès à toutes les connaissances. L’agriculture bio est une des formes d’agriculture les plus abouties en matière d’agronomie. Il n’y a aucune exclusive en la matière. Il n’est pas question d’opposer les différentes formes d’agricultures les unes aux autres.