S’installer autrement
De plus en plus de candidats à l’installation envisagent de le faire en circuits courts, souvent avec un atelier de transformation.
Cette tendance se retrouve dans les chiffres des Points Accueil Installation de la région. En 2015, dans le Calvados par exemple, 33 % des porteurs de projets rencontrés avaient un projet d’installation avec diversification. Dans les Répertoires Départs Installation de Normandie, 24 % des candidats en recherche d’exploitation évoquent une installation avec diversification… Afin de mieux appréhender ce phénomène, rencontre avec un couple qui a sauté le pas.
S’installer en diversification
Il y a 3 ans, Emilie Jalabert et Antoine Houssiaux ont fait le choix de s’installer en Normandie, sur une exploitation diversifiée. Retour sur cette installation hors cadre familial.
Quel est votre parcours ?
Antoine - Je suis originaire de Normandie et j’ai toujours été passionné d’agriculture, bien que n’étant pas fils d’agriculteur. Je me suis formé dans ce domaine. J’ai fait mes premières armes au service de remplacement. Quand j’ai voulu m’installer, j’ai eu une opportunité en Maine et Loire. C’était une bonne expérience mais l’outil était trop gros et ne correspondait pas à mes attentes, à ma philosophie. Après quelques années d’installation sur cette structure, j’ai envisagé une réinstallation sur une exploitation qui soit plus à taille humaine, plus près de ma famille.
Emilie - En ce qui me concerne c’est assez différent. Certes, j’ai une formation agricole mais je ne pensais pas m’installer. C’est ma rencontre avec Antoine qui a tout déclenché.
Comment avez-vous trouvé cette exploitation ?
Antoine - Je connaissais cette exploitation depuis longtemps. Peu de temps après que je sois parti pour m’installer, les exploitants ont commencé à penser à transmettre leur ferme. N’ayant pas d’enfants intéressés, ils ont tout de suite envisagé la transmission Hors Cadre Familial. Mais c’était trop tard pour moi. Quelques années plus tard, quand nous avons envisagé ma réinstallation et l’installation d’Emilie, nous avons appelé le Répertoire Départ Installation (RDI). Les cédants n’avaient concrétisé avec personne. Nous avons donc repris contact et nous nous sommes portés candidats !
Vous cherchiez donc en diversification ?
Antoine - Oui ! Disons surtout que je voulais retrouver une structure à taille humaine : une plus petite unité, un plus petit troupeau. En partant de là, on s’est dit : « Pour qu’une petite exploitation soit viable, il faut de la valeur ajoutée ». D’où la transformation et vente directe. Et c’est un modèle économique qui nous convient. Nous travaillons le produit de A à Z. Nous produisons. Nous transformons. Nous vendons. La marge sur le produit est pour nous.
Emilie - Mais cela implique d’être polyvalents et compétents dans des domaines très variés. Et c’est très chronophage ! Nous n’avons pas vu le jour de toute la première année. Et aujourd’hui encore, nous avons à peine plus de temps. Durant la haute saison (du printemps à l’automne), nous n’arrêtons pas une seconde. Entre la production, la transformation, la vente et les visites… Et à la basse saison, nous faisons tout ce que nous avons mis de côté pendant la haute saison (les clôtures, l’entretien des bâtiments, des abords…). Nous n’arrêtons jamais !
Vous aviez l’expérience de la transformation avant la reprise ?
Emilie - Pas du tout. J’étais dans le commerce agricole donc j’avais l’expérience de la vente mais pas celle de la transformation. Quand nous avons commencé à monter le projet et que les choses ont commencé à se concrétiser, j’ai fait un contrat de parrainage avec la cédante. C’est un bon système mais c’était la basse saison, ce qui n’était pas la période la plus propice pour découvrir la transformation.
Et comment s’est passée l’installation ?
Emilie - C’était très dur au démarrage. Nous avons perdu des clients du fait du changement de producteurs. Quand ce n’est plus la même tête, les clients sont perdus. Mais depuis nous avons rattrapé ce retard et pratiquement développé tous nos produits (crème, fromage blanc, teurgoule). Antoine - Et puis, nous avons des envies de développement. De nouveaux produits, de nouvelles recettes… Mais pour le moment rien n’est fait alors nous n’en dirons pas plus… Si c’était à refaire ?
Antoine et Emilie -Nous le referions !
Des conseils ? Des mises en garde pour ceux qui voudraient se lancer ?
Emilie - Ne pas sous-estimer le temps de travail et accepter que les premières années soient compliquées. En fait, je crois que ça sera toujours aussi intense !
Antoine - Etre bons dans tous les aspects du métier : la production, la vente... Côté production, il faut savoir bien produire. La qualité est notre crédo.
Emilie - Notre meilleure pub, ce sont nos produits !
Carte d’identité de l’exploitation
- SAU : 44 ha (dont 23 ha de prairies).
- Forme juridique : EARL.
- Main d’œuvre : 2 associés et 1 salarié en CDI temps plein.
- Activités : vaches laitières avec transformation du lait et accueil sur la ferme (ateliers pédagogiques).
Focus transformation
- Transformation d’1/3 de la référence lait.
- Le reste est livré à Graindorge.
- Produits transformés : crème, fromage blanc, confiture de lait, teurgoule…
- Ventes : 1 marché hebdomadaire, épiceries, restaurants, boulangeries, drive fermier, magasin à la ferme et magasins partenaires (boutique Graindorge).
Les Chambres d’agriculture vous accompagnent
Un projet en diversification est un projet qui, souvent, nécessite un suivi plus intense, des contacts plus réguliers avec ses conseillers. Le réseau des Chambres d’agriculture est là pour vous accompagner.Les candidats en recherche de structure ou s’établir peuvent contacter les Répertoires Départ Installation de leurs départements.Selon les cas, un contrat de parrainage ou un stage créateur entrepris via Pôle Emploi est envisageable, avec un accompagnement des conseillers Installation Transmission des Chambres d’agriculture.