“Situation critique, Monsieur le Préfet”
Rien ne vaut une petite visite sur le terrain pour prendre la température des productions agricoles. Option prise par le préfet de région, Jean Charbonniaud, vendredi dernier, en Manche.

Conjoncture laitière agitée, idem pour les légumes ou la viande bovine, sans oublier le poids des contraintes environnementales, notamment celle de la directive nitrates ; les sujets de discussion n’ont pas manqué vendredi, au GAEC de la Gonivière (Les Veys, Manche). Face à Pascal Férey et Rodolphe Lormelet, respectivement présidents de la FRSEA et de la structure JA régionale, ou encore Sébastien Amand (FDSEA) et Jean-Hugues Lorault (JA), Jean Charbonniaud, préfet de Région, a pu constater une forte inquiétude du monde agricole. Jean-Claude Haize, l’un des associés du GAEC visité, a d’ailleurs mis en exergue “une situation compliquée sur le secteur, notamment avec le manque d’entretien des digues”. Son exploitation (700 000 l de lait et un atelier de 4 300 poulets), comme il l’explique, “est en dessous du niveau de la mer”.
“Producteurs à bout”
D’emblée Sébastien Amand, pour la Manche, a posé la problématique “légumes” en quelques mots. “Monsieur le préfet, les producteurs sont à bout. Nous voulons pour eux des mesures concrètes et efficaces. Dans un premier temps, une exonération totale des charges sociales pour la part patronale et salariale sur l’année en cours sans oublier de remettre les pendules à l’heure sur les contraintes phytosanitaires”. Sur la conjoncture laitière, Ludovic Blin (section lait FDSEA) s’est fait l’écho de la chute des cours. “L’embargo russe nous pénalise. Le marché est obligé d’absorber 7 % supplémentaires sous forme de poudre ou de beurre, déstabilisant le marché. Dans le même temps, la grande distribution remet en cause les contrats passés au printemps dernier”. Jean Hugues Lorault (JA 50) et Rodolphe Lormelet, estiment que la crise touchant nombre de productions, pénalise du même coup les futures installations. Pascal Férey reprenant l’ensemble de l’argumentaire a donc demandé au représentant de l’État des interventions “pour que les entreprises appliquent les indicateurs de marché. Les pouvoirs publics doivent absolument faire cesser cette course aux prix les plus bas. Enfin, nous demandons à l’Union européenne une hausse du niveau d’intervention sur le lait à 100 €/1 000 l”.
La viande bovine, elle aussi, n’est pas épargnée par la crise. “Des mesures de soutien s’avèrent indispensables. Là aussi, la restauration hors domicile doit absolument privilégier les produits français. De même, le gouvernement doit nous aider à ouvrir de nouveaux marchés à l’export”.
Environnement
Le syndicalisme majoritaire dénonce une course infernale sur l’environnement. “En Basse-Normandie, la révision engagée par le gouvernement français va faire basculer 96 communes, dont 74 dans la Manche dans cette nouvelle trame. Nous dénonçons un classement sans aucune base scientifique. Plus graves, certaines communes sont classées au titre de la continuité territoriale”. La directive nitrates est évidemment peu appréciée. “Des mesures d’accompagnement financier pour les éleveurs doivent être débloquées. Concernant le stockage aux champs, les agriculteurs doivent pouvoir y recourir, malgré l’avis de la commission européenne”. Face à cette avalanche d’interrogations et de demandes, le préfet a pris bonne note de l’ensemble de ces doléances tout en indiquant, “l’argent se fait rare, vous le savez. La Normandie a toujours réussir à s’en sortir. Les enveloppes iront évidemment aux cas les plus urgents”.