Arnaud Lemonier, producteur de lait
Taper dans les charges de mécanisation
Pour des raisons économiques mais aussi d’organisation du travail, Arnaud Lemonier, producteur de lait à Le Vast dans le Val de Saire (50), délègue un maximum de travaux à l’ETA (Entreprise de Travaux Agricoles). Un choix assumé.


de crise, il faut maîtriser ses charges notamment celle de mécanisation. Déléguer ses travaux est une piste à explorer.

"Quand j’ai réalisé mon EPI (Etude Prévisionnelle d’Installation), le technicien de la Chambre d’Agriculture m’a prévenu : fais attention à tes charges. Comme il a fallu que j’achète du foncier, j’ai tapé dans les charges de mécanisation”. Installé en novembre 2003 avec une référence de 185 000 litres sur 70 ha dont 25 de labour, Arnaud Lemonier lance, non sans une pointe d’humour, “j’ai eu l’habitude de travailler 35 heures par semaine”. Et si cet ex-employé du CIA (Centre d’Insémination Artificielle) de Réville (50) se plaît dans son costume d’agriculteur, ou plutôt d’éleveur, il a fait dès le départ ses choix de vie. “J’arrive à être rentré le soir à 19 h !”. Sa femme Sophie, et leurs enfants, apprécient.
Investir dans les conditions de travail
“Du tracteur, j’en ai fait quand j’étais plus jeune. C’est le dos qui trinque. On n’a jamais la puissance et c’est la course à l’investissement”. Pas tendre avec les chevaux DIN Arnaud qui a repris à ses parents un vieux tracteur pour raboter. Il a préféré investir dans les conditions de travail en passant par exemple d’une salle de traite 2 x 3 simple équipement à une 2 x 6 avec décrochage automatique.
Il a d’ailleurs été un peu pris pour un fou au départ, se souvient-il. “A l’époque, la délégation de travaux ne se pratiquait quasiment pas. Mais quand on n’a pas de personnel et que l’on est seul sur son exploitation, il faut savoir faire des choix”. Choix de vie, on y revient, mais aussi choix économique avec une organisation à contre-courant des us et coutumes locaux.
Les chiffres abondent dans son sens: une facture de 3 000 e de fioul et 1 300 e de frais de petits entretiens. Point barre ! “Les concessionnaires ne viennent pas souvent à la maison. Prenez l’épareuse par exemple. Si j’investis, je dois rembourser les annuités. Si je fais appel à l’entreprise, quand la trésorerie est tendue, je peux faire l’impasse”, plaide-t-il.
Adepte du non labour
Dans ces terres en pente où sont cultivés blé et maïs, il faut de la puissance. Les 220 ch du tracteur de l’entreprise Tantel/Folliot(1) (membre de EDT Normandie) réalisent un semis simplifié rapide (jusqu’à 3 ha /h) et de qualité. Arnaud a fait le choix du non labour. “Ça évite de remonter des cailloux et depuis 6 saisons que j’ai fait ce choix, j’ai noté une amélioration de la structure du sol. Quant aux rendements, ils sont équivalents”. Cependant, le non labour suppose une maîtrise très pointue des adventices. Raison sans doute pour laquelle notre agriculteur se garde les traitements, “au cul du semoir avec un anti-germinatif”. Il réalise également épandages d’engrais et passages du canadien. Quoique sur ce dernier poste, il s’interroge : “avec un 3 mètres et mes 80 ch, ça consomme du fioul et du temps. Sans doute le prochain chantier que je délèguerai”.
Une relation humaine
Avec Samuel Folliot, son entrepreneur, Arnaud Lemonier évoque “une relation humaine qui s’est créée au fil du temps avec la proximité en plus”. Car au delà des machines, aussi puissantes et sophistiquées soient-elles, la qualité du service rendu passe par une confiance réciproque. “Un coup de fil et je l’ai tout de suite”, assure notre éleveur (merci aussi le portable). Mais pas un coup de fil la veille pour le lendemain. “Je le contacte généralement une semaine avant la date souhaitée d’intervention pour qu’il puisse s’organiser”. La météo va ensuite affiner le calendrier.
Des chantiers de A à Z, cela ne concerne encore que 10 % des surfaces “mais les choses évoluent”, estime Samuel Folliot qui remercie au passage ses clients qui le font travailler au printemps. “Nous sommes dans ce cas en mesure de proposer des packages en fonction du volume des travaux qui nous sont confiés”. Autre piste scrutée par l’ETA : “le paiement mensuel qu’on essaie de mettre en place et qui peut parfois répondre à des difficultés de trésorerie”.
Et si l’année 2009 a été une année de crise pour l’agriculture, le monde de l’ETA en subit également les dommages collatéraux. L’entreprise Tantel/Folliot a anticipé. Depuis quelques années déjà, elle descend 3 moissonneuses-batteuses et 3 ensileuses dans l’Allier. Un département plus précoce d’un mois sur la Manche. Ce qui lui permet d’aligner 1 000 ha d’herbe, 1 000 ha de maïs et 1 000 ha de céréales avant de commencer sa campagne manchoise.
(1) : ETA Tantel 50700 Valognes
Tél. 02 33 40 14 83.
ETA Folliot 50330 Canteloup
Tél. 02 33 54 10 01.