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Une Baguette du Perche gage de garanties

Depuis 2004, le Parc naturel régional du Perche peut s’enorgueillir d’abriter une filière panicole 100 % locale : celle de la Baguette du Perche. A l’initiative d’une meunerie du coin, celle-ci apporte à ses membres garanties et échanges humains.

baguette du perche
Le Fournil Gabriel, où près de neuf personnes travaillent, est l’une des 35 boulangeries fabriquant la Baguette du Perche. Ci-dessus, Renaud et Nathalie Lafaix, tenant une baguette du Perche.
© DR

Quatre exploitations agricoles, un moulin, une bonne trentaine de boulangeries, le tout épaulé par le Parc naturel régional (PNR) et la Chambre d’agriculture de l’Orne (CA 61). Un savant mélange d’acteurs décidés à mettre en valeur leur région naturelle  à travers un produit différencié : la Baguette du Perche. Les trois maillons de la chaîne signent une convention dans laquelle ils s’engagent à respecter le cahier des charges de la filière. Mais cette convention n’est pas tout : « la confiance et l’humain fonctionnent beaucoup », confie Patrick Pasquier, producteur de blé pour la filière, à La-Chapelle-Montligeon (61).

Concertation inter acteurs

« On ne discute pas 10 ans. Si le cours est haut, j’achète à ce prix, s’il est bas je fais un effort de l’ordre de 10 €/t environ », explique Christophe Guiard, meunier à La Madeleine-Bouvet. Tous les ans, à la fin de l’été, il rencontre les quatre agriculteurs en présence de membres du PNR et de la CA 61. La réunion permet de fixer le prix du blé de la campagne achevée : en fonction du cours actuel, de la qualité de la récolte, estimée via des tests de panification effectués au moulin, un prix est proposé. Ce fonctionnement permet d’apporter une certaine garantie aux agriculteurs engagés : « en moyenne, on a 10 €/t de plus que le cours du marché ». Chaque année, le moulin achète près de 4 000 quintaux aux quatre exploitants, correspondant à deux fois ses besoins annuels pour la production de la baguette : « l’objectif, explique le meunier, est d’avoir au moins une année d’avance afin de garantir l’approvisionnement des boulangeries en farine, même en cas d’accident ».

Suivi agronomique

La réunion est aussi l’occasion de choisir les variétés qui seront utilisées lors des semis de l’année suivante. Xavier Goutte, responsable agronomie et productions végétales à la CA 61, est chargé de proposer ces variétés correspondant le mieux aux attentes des acteurs de l’aval et adaptées aux conditions pédoclimatiques de chaque exploitant. Sur leurs parcelles, ces derniers sèment un mélange de cinq variétés en moyenne. « J’essaie de jouer sur la complémentarité entre variétés pour être sûr d’atteindre un certain niveau de qualité. On ne sacrifie ni le rendement, ni la note de panification. Je m’appuie sur un outil cartographique pour prendre en compte la diversité des parcelles », déclare Xavier Goutte. La convention imposant la limitation de la fertilisation et des traitements, les agriculteurs doivent fournir des fiches techniques pour chaque parcelle. En outre, il leur est obligatoire de réaliser un reliquat azoté et d’effectuer un bilan prévisionnel de fumure. Pour Patrick Pasquier, la question de l’entretien des haies, stipulée dans le cahier des charges, n’est pas un problème : « sans cela, on les entretiendrait quand même ».

Une aventure humaine


« On garde un pouvoir de décision, atteste Patrick Pasquier, on peut solliciter à tout moment une réunion et il existe un réel respect au sein de la filière. Je m’y sens bien. Je suis attaché au Perche et pour moi, la démarche est une sorte d’aboutissement de l’intérêt que je lui porte, une véritable démarche paysagère ». Au moulin, Christophe Guiard s’exprime également en termes élogieux : « ce que j’adore, moi, c’est parler métier et produits avec les agriculteurs et les boulangers, et pas seulement prix. C’est possible dans une filière locale comme la nôtre. On a tous besoin les uns des autres et on cherche à garder de bonnes relations pour que tout le monde ait sa part du gâteau ». A l’extrémité de la chaîne, Nathalie et Renaud Lafaix, boulangers à Nogent-le-Rotrou, fabriquent une trentaine de Baguettes du Perche par jour dans leur établissement où travaillent neuf personnes : « c’est ce que nous cherchions : un produit différencié et en circuit court. Les gens du Perche sont très attachés à l’identité locale et apprécient le goût typé de ce produit ». A la Chambre d’agriculture, Xavier Goutte résume : « C’est un bel exemple d’un truc simple qui fonctionne bien ».

 

Questions à Camille Henry, responsable du pôle valorisation des ressources, chargée de mission agriculture au PNR du Perche
>> Quelle est l’histoire de la Baguette du Perche ?
En 2004, un meunier est arrivé dans le Perche et voulait concevoir une marque pour un produit différencié. Pour le Parc naturel régional (PNR) du Perche, cela constituait l’occasion de créer un produit local qui mette en valeur son origine (un territoire attrayant) et une démarche environnementale. Il y a alors rapidement eu des échanges avec la Chambre d’agriculture pour travailler sur les aspects agronomiques du cahier des charges. On s’est appuyé sur les CTE* que respectaient déjà les quatre agriculteurs. En 2008, le meunier a souhaité se spécialiser dans le bio et a vendu sa marque Baguette du Perche à la minoterie Guiard-Ornaise, à la Madeleine-Bouvet (61).
>> Quelles sont les dimensions de la filière aujourd’hui ?
A l’heure actuelle, il y a toujours quatre exploitations agricoles, qui produisent quelques 3 500 quintaux par an, sur une soixantaine d’hectares. La totalité des grains récoltés par les agriculteurs engagés est écrasée par la minoterie Guiard-Ornaise, qui vend et livre la farine aux 35 boulangeries fabriquant la baguette du Perche, vendue à environ 1,1 € l’unité. C’est une filière qui fonctionne très bien mais dont le nombre de boulangeries disponibles sur le territoire restreint l’extension.
*CTE : Contrats territoriaux d’exploitation, éléments mis en place au début des années 2000, dans le cadre du deuxième pilier de la PAC et conçus sur une approche globale au niveau de l’exploitation.

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