Haie
Haiecobois dénonce les contraintes du label haie dans la Manche
Après avoir visité une plantation de haie, un chantier de bois déchiqueté sur l'exploitation de Jean-François et Stéphanie Tapin à Feugères, puis la chaufferie du collège de Périers, l'association Haiecobois a voulu sensibiliser différents acteurs, dont le préfet de la Manche, aux actions de gestion de haies dans la Manche.
Après avoir visité une plantation de haie, un chantier de bois déchiqueté sur l'exploitation de Jean-François et Stéphanie Tapin à Feugères, puis la chaufferie du collège de Périers, l'association Haiecobois a voulu sensibiliser différents acteurs, dont le préfet de la Manche, aux actions de gestion de haies dans la Manche.
Depuis 2001, la filière bois bocagère dans la Manche se développe avec notamment la mise en place de chaudières à bois déchiqueté. Ce fut le cas à Périers au collège en 2010. "Il nous faut 100 tonnes par an pour alimenter la chaudière qui permet de chauffer différentes installations comme le collège, le pôle enfance de la Communauté de communes ou encore le gymnase", expliquent Steve Gosselin et Elise Radigue de l'entreprise Dalkia, en charge de la maintenance des installations pour le compte du Conseil départemental de la Manche.
Et la matière première provient de la ressource locale. Un des apporteurs se situe à quelques centaines de mètres. Il s'agit de François Rihouet, agriculteur à Périers, et adhérent à l'association Haiecobois. "Il s'agit du bois de l'année précédente qui doit répondre à des normes. Je prends une pelle pour mesurer le taux d'humidité qui doit se trouver entre 20 à 25 %", explique le technicien, qui gère chaque arrivée de copeaux.
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Un second plan bocage en écriture
Si 25 collèges dans la Manche sont équipés de chaufferie, c'est en raison d'une politique du Conseil départemental en faveur du bocage. Un premier plan a été élaboré entre 2017 et 2021. "Et nous écrivons le deuxième qui s'étendra jusqu'en 2028 afin de continuer à aider à la plantation pour préserver et valoriser le blocage manchois", indique Véronique Martin-Morvan, conseillère départementale.
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Montrer les enjeux de la filière
Le 12 avril dernier, différents acteurs de la filière, dont le préfet de la Manche, Xavier Brunetière, étaient réunis autour d'Emmanuel Jean, président de l'association Haiecobois, sur le secteur de Périers. L'occasion d'expliquer l'enjeu de la filière et la gestion des haies dans la Manche, premier département bocager de France.
"L'association réunit 250 producteurs qui permettent d'alimenter 56 chaufferies, et produire 5 000 tonnes de bois dont 3 500 tonnes pour le chauffage et 1 500 tonnes pour le paillage", précise Emmanuel Jean. Haiecobois s'appuie aussi sur la Cuma départementale Ecovaloris pour conduire les chantiers de déchiquetage, Cuma qui compte 600 adhérents et un chiffre d'affaires de 500 000 €.
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Stop à la réglementation
À quelques kilomètres de la chaudière sur la commune de Feugères, la délégation a accompagné le préfet de la Manche sur l'exploitation de Stéphanie et Jean-François Tapin pour voir à la fois une plantation de haies et un chantier de déchiquetage.
"J'ai planté 100 m de haies il y a deux ans avec le concours du Conseil départemental", explique Jean-François Tapin. Sur l'exploitation, il compte 140 ml/ha de haies. Il s'est doté d'un plan de gestion comme 65 % des adhérents de Haiecobois. "On a assez de haies sur nos exploitations, avant de devoir en remettre au milieu des champs", sourit un agriculteur pour faire écho aux nombreuses réglementations en cours sur la gestion de la haie.
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Faire une marge positive
Et c'est un des points que l'association Haiecobois a voulu mettre en avant auprès du représentant de l'État. "Aujourd'hui, nous avons encore trop de contraintes sans parler du coût de l'entretien. Les charges d'entretien se montent à 64 € HT/t. Si je voulais faire une marge positive, il faudrait plutôt tendre vers 100 € HT/t sur mon exploitation, m'équilibre étant à 84 € HT/t", note Jean-François Tapin.
C'est sans parler du label haie auquel il est opposé comme les adhérents. "Ce label impose à nouveau 40 points de contrôles supplémentaires. Sur le plan national, il n'y a que 100 agriculteurs qui se sont engagés. Cela prouve bien que cela ne correspond pas aux attentes du terrain. Les plans de gestion durable des haies sont suffisants", insiste l'éleveur
Il tire la sonnette d'alarme également sur le fonds chaleur de l'Ademe qui préconise 10 % de bois labellisé. "C'est mettre un frein au développement des chaufferies et à l'alimentation par du bois local", conclut-il.
Mieux comprendre sur le terrain
Dans le cade de France Nation Verte, le Pacte en faveur de la haie a été présenté à l'automne dernier par le ministre de l'Agriculture. Le préfet de la Manche, Xavier Brunetière, est venu sur le secteur de Périers à l'invitation de Haiecobois pour "mesurer et comprendre toute cette filière, cette économie qui participe aussi à la réduction des gaz à effets de serre", explique-t-il.
Il a rappelé également que le programme national "vise à ce que la haie ait une rentabilité, une valeur économique parce qu'elle constitue un des leviers de la réduction des gaz à effets de serre. J'entends les préoccupations et les attentes d'adaptation face au label haie. Mais au-delà du label, on a un enjeu global de gestion des haies. Cela a été évoqué au travers d'Haiecobois avec une logique de gisement sur 20 km autour des chaufferies, une ressource locale, une gestion durable et raisonnée... Ce sont des éléments importants qui nous permettront d'atteindre nos objectifs 2030 dans le cadre de la planification écologique. Cela a une vraie valeur, un vrai intérêt", conclut-il.