Jersiaise : petit gabarit mais du punch
Elle n’a peut-être pas un format exceptionnel, mais la productivité laitière est au rendez-vous. Petite visite dans le plus gros élevage de France, situé à Sainteny, non loin de Carentan.
Parler de la Jersiaise dans un département situé à quelques encablures des îles Anglo-Normandes pourrait sembler logique ; eh bien non puisque cette laitière n’a pas d’énormes effectifs en Normandie. Issue d’un rameau des races bovines celtiques, elle a longtemps brouté les verts pâturages de nos voisins avant de se voir propulser au rang de “Star”. Même la Reine d’Angleterre élève des Jersiaises au château de Windsor. Sa renommée, la Jersiaise la doit à sa longévité, d’excellentes reprises de lactation, sans compter avec des taux que beaucoup de races lui envient. Aujourd’hui la demande est telle pour des vaches en lait qu’il est difficile d’en trouver, sauf si l’éleveur est patient.
Passage en bio
Au Gaec de la Haute-Folie, drivé par deux associés (Marc Dugay et Stéphane Zewe), la Jersiaise s’est révélée la race idéale pour adapter l’exploitation à une nouvelle donne, celle de l’agriculture biologique. “La ferme étant située sur des zones de captage, nous nous devions de faire quelque chose pour la protection de la
ressource, d’où notre engagement en bio”. Du coup, exit les
Prim’Holstein, bonjour les
Jersiaises. “Nous sommes passés d’un système maïs à un système tout herbe avec du séchage en grange”. Sur les quelques 103 ha de SAU, 170 animaux, dont 150 en production, pâturent en toute tranquillité. “Sur 2015, explique Stéphane Zewe, en raison de rotations sur les terres, nous avons fait un peu de méteil (16 ha) et de maïs (6 ha), le tout en bio bien évidemment”.
La ration hivernale, elle, est habituellement composée de 16 kg de MS foin. “Cet hiver, cette ration sera basée sur 2 kg de maïs, 1 de méteil et 13 de foin”. Inutile de dire que le GAEC est en quasi-autonomie, “nous achetons juste du maïs grain pour les petits veaux”.
Belles performances
700 000 litres sont livrés chaque année à la laiterie, en l’occurrence Isigny-Ste-Mère. La moyenne de lactation (5 300 l/VL) n’est pas très élevée lorsque l’on regarde vers la PH ou la Normande, mais les taux sont très intéressants : 40 en TP, et 56 de MG. Pas question de booster les animaux, “âge au premier vêlage se situe à 26 mois pour un sevrage à six”. Dès que la lactation démarre, la Jersiaise trouve son rythme avec une bonne reprise de lactation et, chose rare, deux veaux par an. L’idéal serait évidemment de n’avoir que des femelles. “Lorsque nous avons des mâles, j’essaye de les vendre…”. Reste qu’en première IA, le taux de réussite au Gaec de la Haute-Folie atteint 75 %, “nous inséminons nous-mêmes”. Quant aux semences sexées, “60 % de succès”. Le troupeau vieillit plutôt bien avec des animaux en sixième lactation. “La Jersiaise peut monter au moins jusqu’à 8, tant que les mamelles tiennent, il n’y a pas de problème”. En réforme par contre, la carcasse ne pèse pas bien lourd dans tous les sens du terme avec 200 kg au palan. Dans la stratégie d’accouplement, les deux associés privilégient les taux bien sûr, mais aussi les aplombs et la fertilité. Grâce à une surveillance de tous les instants, l’avenir de l’élevage est vu avec sérénité ; seul bémol, “nous espérons que le prix du lait va remonter. Même en bio, nous sommes moins bien rémunérés et nous avons des traites à payer comme tout le monde”.
Depuis quelques années, le GAEC a voulu mesurer ses
performances avec celles des
autres élevages. Quelques plaques commencent à apparaître sur les murs ou encore de beaux trophées dans le bureau. “Nous avons participé au Festival de l’Élevage de Lessay avec deux animaux. La première, “Rebelote” a fait première de
section et réserve de championnat à Paris l’année dernière. Sa fille, “Flipper” a terminé seconde de section et meilleure mamelle espoir du dernier National Jersiaise, sans oublier le trophée de Championne Lessay 2015”.
Le GAEC de la Haute-Folie pourrait continuer à faire des étincelles en concours. Un Interrégional Jersiaise pourrait se dérouler en mai 2016, à Lessay, si toutes les conditions sont réunies. Cette manifestation se tiendrait dans le cadre des interrégionaux Brune et Prim’Holstein.